La harpe celtique

Le Fou dans ses papiers vieux poèmes a trouvés,
qu'il entendit conter en château de Comper.
Brizeug aurait écrit en breton le premier,
Le Braz en l'écoutant composa le second
dans un français récent que vous pourrez goûter
car c'est un même rêve qu'il a voulu conter.

Dilezet war gerreg ar mor
Tevel a rae an delenn aour
E c'horfig hanter zigoret
Hag a c'hordinigou torret
O wellout un dizeur ken bras
Va c'halon ivez a rannas
Me 'gavas enni un nervenn
Hag e stagas ouzh an delenn
Ur gordennig a garantez
Ar re all a stagis ivez
Evit pep oad, evt pep stad
Breman son ar sonerezh vat
Sonit telenn ar vretoned
Kalz komfort allas n'o deus ket

Quoi? Point de traduction? Beau sires et belles dames,
ne suis-je point un Fou? Veuillez calmer vos âmes,
car un bien beau poète, bien mieux qu'un pauvre fou,
pour la harpe celtique écrivit vers si doux
qu'à ma bien grand'honte j'ai modifiés pour vous:

Un soir que vous rêviez assise au bord des grèves,
Vint s'étendre à vos pieds le harpeur de Comper.
Les rêves qu'il chantait ressemblaient à vos rêves,
Comme Brocéliande aux rumeurs de la mer.
Il disait la beauté de la terre Bretagne,
Son sortilège lent, délicat et secret,
Et c'était votre charme, amie de Viviane,
Qu'en chantant son pays le harpeur célébrait.

Et le Fou en grattant sur sa harpe celtique
rêve encore à Comper et à Brocéliande,
au Perron de Merlin et à jolie Morgane
qu'il a cru voir un soir qu'il égrenait ses notes
assis sur un rocher au bord de la fontaine
qu'on dit de Barenton. Elle s'était posée
comme pour écouter bruire Brocéliande
et résonner au son de la harpe celtique...
Quand la dernière note se fut évaporée,
l'ombre devenue dense ne me l'a point celée:
après un long soupir elle m'a semblé voler
vers des fourrés si drus que le Fou n'a osé
s'y avancer de nuit sans être protégé.
Or dès le lendemain, avec deux ou trois gardes
du château de Comper, il a fouillé buissons,
trouvant moult écorchures, car le Fou n'est qu'un barde
et la forêt sauvage est pleine de leçons
pour qui n'a point appris qu'aux branches les épines
servent de protection. C'est écartant épines
que le Fou est tombé sur le chemin discret
qui entre les buissons menait à la chapelle
et au puits asséché de Saint-Emmanuel.
Et si mélancolie rend votre Fou distrait,
c'est qu'il a l'impression que la fée l'appelait,
mais qu'il fut trop couard que pour oser fouiller
le tunnel sis au fond du vieux puits asséché...

Un soir que vous rêviez assise au bord des grèves,
Vint s'étendre à vos pieds le harpeur de Comper.
Les rêves qu'il chantait ressemblaient à vos rêves,
Comme Brocéliande aux rumeurs de la mer.
Il disait la beauté de la terre Bretagne,
Son sortilège lent, délicat et secret,
Et c'était votre charme, amie de Viviane,
Qu'en chantant son pays le harpeur célébrait.

Votre Fou rêve encore aux beaux yeux de la fée
qui rêvait la forêt par ses notes enchantée...
Ainsi parfois la nuit, votre Fou rimailleur
rêve à Brocéliande, et parfois rime ailleurs...

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