Module 8. Logique. Manier les idées. 98 interactions. 77 QCM.

Les idées?

Parfois, vous trouvez que les propos de vos amis manquent de logique, mais vous est-il arrivé d'ouvrir un livre de logique? Lequel?
Réaction 1


Vous avez entendu parler d'Aristote, d'Abélard? Ou de l'un des titres suivants?

Bibliographie.

Antoine ARNAULD et Pierre NICOLE. La Logique ou l'art de penser, 1662, (Flammarion, 1970), 440p.
Robert BLANCHÉ. Introduction à la logique contemporaine, P., Colin, 1968, 204p.
James D. CARNEY et Richard K. SCHEER, Fundamentals of logic, N.Y., Macmillan, 1974, 428p.
Lewis CARROLL. Logique sans peine, trad. de J. Gattegno et E. Coumet, P., Hermann, 1968, 288p.
Jean-Blaise GRIZE. Logique et langage. Paris, Ophrys, 1990, 153p.
Régis JOLIVET, Logique. Cosmologie. Paris, Vitte, 5e éd.1961, 495p.
Georges LAKOFF. Les Métaphores dans la vie quotidienne. Paris, Minuit, 1985, 254p.
Louis LAVELLE. Manuel de méthodologie dialectique. P., P.U.F., 1962, 179p.
Gottfried Wilhelm LEIBNIZ. Nouveaux essais sur l'entendement humain. Rééd. GF-Flammarion, 1990.
Roger MARTIN. Logique contemporaine et formalisation, P., P.U.F, 230p.


Depuis des siècles, la logique et le droit ont gouverné, ou tenté de le faire. Pourquoi ont-ils eu tant de prestige? Détiennent-ils la vérité?
Réaction 2


On le croyait. Hégel et Marx ont remplacé ce préjugé par celui d'un mouvement collectif vers un progrès historique. Leur synthèse « communiste» a échoué mais l'idéologie du progrès (politique, économique) triomphe encore presque partout. Chacun veut travailler au bonheur de tous. Cela ne manque pas de logique, mais il y a maintenant une place pour une logique individuelle, voire pour un certain illogisme sympathique, celui des artistes par exemple.

Étudier la logique est donc inutile à l'écrivain?
Marcel Achard remercie les Académiciens de recevoir parmi eux un auteur comique. Non «pour l'acuité de votre discernement» précise-t-il mais pour «votre courage». Le public «méprise les amuseurs» et en m'accueillant, vous les avez réhabilités. Y a-t-il de la logique dans ces allégations?
1 Non. Les écrivains entrent à l'Académie pour donner sur la pureté de la langue des avis autorisés.
2 Oui. En venant rire à ces pièces, le public fait exactement ce qui est attendu de lui.
3 Non. L'estime du public pour l'auteur devrait être d'autant plus grande qu'il parvient à susciter l'hilarité.
4 Oui. En faisant sourire ses confrères, Achard est logique avec lui-même.
Réaction 3


Au contraire! Il est le premier à reconnaître à chacun de ses personnages le droit de développer sa logique propre. Il multiplie les approches et les distinctions. Il comprend la logique de plusieurs manières.

Et c'est justement ce que nous allons pouvoir faire aussi bien que lui en distinguant la sémantique, la pragmatique, la logique et, ultérieurement, l'argumentation. Car il est nécessaire, pour que la logique «morde» sur le réel, d'avoir d'abord défini les mots et les choses et d'avoir aussi placé ses idées dans le contexte des personnes qui parlent.

La logique intervient alors afin de déterminer les relations qui peuvent s'établir entre les idées.

Faisons le point. Vous avez abordé un domaine. Vous êtes en train d'accumuler la documentation nécessaire (une dizaine de livres parcourus, une centaine de fiches doc rédigées et bientôt classées, car vous avez acquis une certaine capacité d'extraire de certains mots-clés, par les variantes en contexte, des définitions, donc des vedettes, générique et spécifiques). Votre palette conceptuelle a rassemblé les termes clés du domaine et leur organisation s'ébauche. Comment préciser les relations de ces mots entre eux? Peut-on tabler sur eux pour aller vers les contenus possibles des lectures (et lire à l'aide d'hypothèses)?
Réaction 4


Oui et non car ce ne sont d'abord que des mots, ce qui est commode, mais il faut des phrases pour qu'ils s'assemblent dans une idée. Or ces phrases sont sur nos fiches. Et les vedettes de ces fiches les résument. Cela étant (mais seulement si le travail a été effectué noir sur blanc personnellement) le mot peut contenir l'idée : il la résume. Les Romains nous ont habitués à faire tenir toute une pensée dans un seul mot. Vita brevis. La pragmatique est alors implicite et la condensation du réel dans les mots permet leur maniement logique formalisé.
Tout A est B. Or tout B est C. Donc tout A est C.
Tout A est B. Or x est A. Donc x est B.
Tout cercle est rond. Or nul triangle n'est rond. Donc nul triangle n'est cercle.


La logique permet de comparer des contenus, d'explorer ainsi dans un domaine toutes les possibilités de relations et de conclusions. Tenir tous les termes sur sa palette donne l'illusion de maîtriser, sinon le domaine lui-même, du moins la totalité de ce qu'il serait possible de dire par le moyen des termes réunis. C'est l'illusion structuraliste, qui réduit la pensée aux termes disponibles de son expression. Point de départ exhaustif quoique formel... La logique est-elle limitative? Va-t-elle entraver les découvertes?
Réaction 5


Pratiquée ainsi, elle paraît l'être, quoique l'exploration de toutes les relations entre une cinquantaine de concepts, ce soit une combinatoire qui défie déjà les capacités individuelles (2x2x2...cinquante fois). Si chaque combinaison engendre une idée, cette apparente limitation est déjà illimitée. Être systématique débouche sur du neuf! Et en telle quantité que le risque est moins de s'y enfermer que de s'y perdre.

Que peut-on entreprendre pour progresser dans son propre objectif?
Réaction 6


D'abord, compléter son fichier, le classer, dresser sa nomenclature, en sorte qu'il devienne significatif de tenter d'établir des relations entre ces mots, qui sont des embryons de sens en contexte. Des relations de toutes sortes mais de préférence des relations logiques.

Une porte entrouverte est-elle ouverte ou fermée?
1 Ouverte.
2 Fermée.
3 A la fois ouverte et fermée.
4 Ni ouverte, ni fermée.


Tout peut se joindre, dans la pensée (ou presque). Pour que deux choses s'excluent, il faut qu'elles soient du même genre. Ainsi seulement, un référent donné ne pourra-t-il être à la fois l'une et l'autre. Ici, on a une position de battant de porte. Par quel concept la caractériser? Si l'on rejette les deux extrêmes, puisqu'on est entre les deux, il faut créer un concept de plus : «Entrouverte». Mais on peut aussi saisir un instrument de mesure. On peut savoir de combien elle est entrouverte. Un millimètre? Un centimètre? Un pouce? Un pied? Sort-on alors du domaine des lettres pour passer dans celui des sciences?
Réaction 7


Aller jusqu'à prendre une mesure est plus précis. Et la précision a son importance. Ce serait le cas s'il s'agissait de laisser passer juste la bonne quantité d'air frais. Or prendre des mesures suppose un instrument (le mètre). Celui-ci, loin de supprimer la qualité (l'idée), la fait passer dans la réalité, la transforme en quantité mesurée. Nous avons là, en raccourci, toute l'histoire des sciences.

Loin de s'opposer aux lettres, elles s'élaborent sur la base des idées, qu'elles étoffent par des instruments, ce qui les précise, puisqu'ainsi ces idées s'appliquent suivant des critères quantifiables. On peut présenter les sciences comme une extension de la littérature. La littérature peut se passer des sciences (ex. : les mythes primitifs) mais les sciences impliquent toute une littérature sans laquelle les symboles ne seraient que de petits dessins.

Supposons que par cette porte entrouverte, un personnage aperçoive les agissements d'un autre et qu'il s'ensuive toute une histoire, purement fictive (l'apparition d'un couple d'extra-terrestres débarquant d'une soucoupe; un corridor menant à une galaxie par spagettisation) : un tel développement du concept "entrouverte" serait-il scientifique ou littéraire?
Réaction 8


Ni l'un ni l'autre quoique les deux en apparence. On quitterait le domaine de la réalité, qui est à la fois littéraire et scientifique, pour fabuler, littérairement mais scientifiquement aussi. C'est que les «dimensions» (à critérier et à mesurer) restent toujours celles d'une énonciation (effective : celui qui parle, etc.) et celles d'un contenu (action, personnes, etc., comme on l'a vu). Rien ne ressemble davantage au monde que nous connaissons que celui que nous sommes capables d'inventer.

Les mathématiques de pointe, qui ne trouvent d'application qu'après coup et comme par hasard, sont un bon exemple de ce que la logique peut inventer et réaliser. Mais en quoi ceci peut-il concerner nos propres travaux? Voulez-vous tenter un essai d'application immédiatement, « pour voir»? Prenez une de vos fiches doc (au hasard), tirez-en deux concepts et inventez-leur une relation, mettez-les dans la même phrase (en ajoutant qqch. qui fasse que le tout ait un minimum de sens).
Réaction 9


Avez-vous réussi? Vous êtes en train d'apprendre à jouer à la fois sur la sémantique, la pragmatique et la logique, sur des ensembles de sèmes qui existent pour vous et entrent en relation.

Combiner des sèmes.

La logique rend la sémantique opérationnelle mais en passant par la pragmatique. Mieux vaut garder ainsi notre contact avec le réel sous ses différentes formes. Il est là constamment pour diversifier et renouveler les contenus sémiques.

On a vu (triangle sémantique) l'impossibilité de passer des mots aux choses ou des choses aux mots sans avoir des idées. Les idées jaillissent des comparaisons mais aussi elles se mettent en relation (pour peu qu'elles soient situées). Pour assister à ce jaillissement en soi, il suffit d'opérer des rapprochements conceptuels.
Une dame enceinte, qui transporte un colis marqué hard disk, rencontre un ami dans l'ascenseur. --- Vous avez, lui glisse-t-il, un disque dur mais une sphère douce...
1 Rapprochement stupide.
2 Humour surréaliste.
3 Non-sens inconvenant.
4 Rapprochement baroque.
"Horreur vivante, honte, ignominie comblée de désirs, à la fin je t'ai acquise comme la science!" (Claudel, Tête d'or) De quelle sorte d'ajout s'agit-il? ________.
1 Un baroquisme, car les mots, les idées, les figures semblent le fruit d'une grande recherche.
2 Une accumulation, car il y a plusieurs mots de même fonction et de même classe de sens.
3 Une énumération, car on ajoute des éléments de contenu de façon à constituer une série.
4 De verbiage car il s'agit de dire des riens.
Méfiez-vous de la facilité. Il faut se garder de tomber du côté où l'on se penche (Colette). C'est ______.
1 une pointe (pensée subtile, dont la forme pose un défi au lecteur)
2 un concetti (formulation inattendue, qui montre de l'esprit)
3 du baroquisme (excès de recherche dans les idées et dans l'expression)
4 du persiflage (on feint de louer mais c'est pour réprouver)
Y a-t-il du baroque dans ces quatre vers de Luis de Camoens, qui terminent un sonnet? Pour panser ma blessure implore donc ce Dieu // Qui dans ton beau printemps ta jeune vie trancha / Qu'afin de te revoir il m'arrache d'ici / Aussi vite qu'il sut t'arracher à mes yeux.
1 (Il faudrait pouvoir lire l'original, en portugais.)
2 L'amour au delà de la mort.
3 Les qualifications et l'équilibre syntaxique.
4 «Aussi vite qu'il sut...»
On sait qu'un affront du père de Chimène envers celui de Rodrigue a obligé ce héros à un duel dont, contre toute attente, il sort vainqueur. Chimène à son tour suscite à Rodrigue un duel car elle se doit, elle aussi, de venger son père, comme Rodrigue l'avait fait pour le sien. Rodrigue alors vient lui dire qu'il ne se défendra pas contre Don Sanche. «Je vais lui présenter mon estomac ouvert / Adorant, de sa main, la vôtre qui me perd.» (Corneille, le Cid, v.1499-1500).
1 Situation classique. Le héros mourra pour accomplir le souhait de sa «maîtresse».
2 Situation baroque. L'invincible se laisse vaincre par amour.
3 Éloquence subtile. Il accule Chimène à le perdre si elle ne renonce pas à venger son père.
4 «Pointe» baroque (agudeza, conceptisme).
Réaction 10




La logique ne peut s'exercer sur rien. Sa matière est faite d'idées et de relations entre elles. Les idées "copulent", dit Valéry. Le difficile n'est pas d'en avoir, mais de diriger leur flot, une fois découverte la manière de les inventer.

Exemple, puisé dans le domaine de l'orthographe.
On observe que ph se prononce f. On lit dans le dictionnaire de la prononciation de Martinet et Walter (p.22) que quand deux lettres transcrivent un seul son, c'est un digraphe. On cherche un analogon. Peut-on avoir trois lettres pour un seul son? Eau, par exemple. Serait-ce un trigraphe? On feuillette Martinet et Walter. Ils en parlent. C'est bien le mot qu'ils utilisent. Ainsi, une idée à jailli de deux autres, et elle a reçu son nom. On a découvert des mots et des choses.


Va-t-il vraiment falloir, pour écrire, se tordre les méninges, assembler une à une des idées en comparant des définitions jusqu'à parvenir à en concevoir de nouvelles? Est-ce la seule façon d'apprendre à rédiger? Écrire, c'est bâtir de nouvelles phrases, assembler autrement ses mots, c'est l'exercice d'une compétence strictement linguistique ou stylistique, acquise par imitation des auteurs à succès ou contre eux, mais sans devoir aller jusqu'à la logique, non?
Réaction 11


L'expression suit parfois la pensée sans même qu'on doive y penser. La linguistique et la stylistique sont utiles mais pas aussi indispensables que la logique. Pénétrer la diversité du réel et celle des mots se fait, seul ou avec d'autres, par un maniement d'idées dont on peut acquérir les rudiments. La logique met les idées en relation les unes avec les autres, dans leur pureté, selon quelques règles élémentaires (induction, déduction), moins compliquées qu'on ne croit, et qu'on utilise déjà sans le savoir, journellement.

La pragmatique ne suffit pas bien qu'elle s'occupe des types d'actes de parole, des intervenants, de leurs intentions, de leurs positions. Elle analyse l'énonciation comme acte effectué. Elle ne crée ni n'invente encore quoi que ce soit de nouveau. Si l'on rapproche les positions défendues par deux groupes antagonistes, c'est la logique qui permettra de montrer qu'il existe une troisième voie pour sortir du dilemme, par exemple. En campant sur le terrain apparemment plus solide de l'abstraction, des concepts, des contenus, la logique se détache tant soit peu de la réalité envahissante et se donne un espace de liberté. Elle permet d'aller du particulier au général, ou du général au particulier, par l'intermédiaire de la négation ou de l'affirmation. Ainsi s'explique qu'elle puisse paraître si décisive et, malgré cela, dans certains cas, ne l'être pas du tout (il y a un risque dans l'hyperlogicisme).

Pourquoi faut-il commencer par la sémantique et la pragmatique pour passer ensuite à la logique et à l'argumentation?
Réaction 12


On ne bâtit pas sans matériaux. Il faut sans cesse alimenter son travail par des lectures, des élucidations de sèmes, des repérages de prises de position, pour ensuite opérer des rapprochements qui seront parfois féconds, engendrant des idées nouvelles, ou des arguments (sur des fiches synthèses).

Quelle différence voyez-vous entre une démarche qui assimile et met en oeuvre ces disciplines intellectuelles et la façon de procéder sans méthode, où l'on tente de rédiger sur le pouce, sans préparatifs?
Réaction 13


S'arracher à la répétition plus ou moins aveugle des paroles entendues, aux habitudes inconscientes, qui sont la façon collective d'aborder le réel, analyser les idées et les mettre en relation dans la lumière comme intemporelle qui peut les faire briller d'elles-mêmes, tirer des conclusions ou tisser de nouvelles hypothèses, c'est pratiquer la logique.

Elle passe toujours par les mots. Mais comme son lien avec le réel reste le problème primordial, la question de l'existence et des quantités se pose. À la logique «majeure» de la dialectique s'adjoignent donc les calculs mathématiques, des tableaux, des graphiques, des opérations sur les ensembles, de l'analyse combinatoire, des indices de sondage, des statistiques. Rien de tout cela, qui peut demander des travaux d'équipe et des années de recherche, n'est exclu; mais pour l'actuel apprentissage, il suffit ...de savoir comment s'y prendre, de savoir ce qu'on peut faire.
Comparer: a sapin - lapin; b sapin - épicéa; c sapin - conifère; d sapin - bouleau. Réponses possibles: A Lexicologie (ce sont des paronymes); B Sémasiologie (épicéa est le terme propre); C Logique (sapin est l'hyponyme de conifère); D Contexte réel (un bouleau est qqch. d'autre).
1 aA bB cC dD
2 aD bC cB dA
3 aA bC cB dD
4 (Autre chose)
Ordonnez les éléments ci-dessous selon le principe: "Passage à une catégorie de plus en plus large". a) Pommes produites au Québec (b) Fruits (c) Pommes canadiennes (d) Pommes Mc Intosh québécoises (e) Fruits canadiens.
1 (a) (d) (e) (c) (b)
2 (d) (a) (c) (e) (b)
3 (a) (d) (c) (e) (b)
4 (b) (e) (c) (a) (d)
Réaction 14


Aurait-on obtenu le même classement si d avait été Pommes Mc Intosh sans plus?
Réaction 15


Oui et non. D'abord (a), (d) ensuite, aurait aussi été possible. Et dans la pratique, cela se produit souvent. Il faut simplifier ou spécifier pour arriver à classer. La mise en ordre entraîne des ajustements.

Les substances comparées ci-dessus --- et tous les génériques ou spécifiques --- sont habituellement des noms communs ou des qualificatifs. Pour les autres types de mots, les adverbes, les verbes, les pronoms, y a-t-il une place en logique? Ou bien celle-ci ne travaille-t-elle que sur les substantifs et les qualificatifs?
Réaction 16


Elle travaille aussi sur les verbes et les adverbes, donc avec tous les mots lexicaux. C'est normal puisque ceux-ci donnent des sèmes. Voici un exemple avec verbe et qualificatif.
Voici trois couples de mots renfermant chacun un verbe et un qualificatif. a) automatiser, automatique b) raccourcir, court c) anoblir, noble Dans chacun de ces couples, il y a une relation entre les deux termes. Cette relation est ________.
1 partout la même
2 un peu différente en a
3 un peu différente en b
4 un peu différente en c
Réaction 17


Les mots lexicaux ont par définition un contenu sémantique. Mais les noms propres et les pronoms désignent des substances de façon directe, sans contenu sémantique, par dénomination propre ou par désignation contextuelle. Ex. Gérard, il est à Zurich. Les autres mots grammaticaux n'ont pas d'emploi en logique, faute de contenu conceptuel. Les noms propres et les pronoms ne peuvent désigner que des "individus" au sens logique du mot (on ne peut les diviser conceptuellement, les analyser). Ils peuvent seulement servi de thème, pas de prédicat. On touche ici à quelques distinctions fondamentales.
-- Je vois un chien. -- Quel genre? -- Bas sur patte. -- Kip? -- Lui-même.


Quelle différence voyez-vous entre les trois dénominations (en gras) de la même substance?
Réaction 18


La première est un générique. Le nom commun de chien contient les sèmes communs à Kip et à ses congénères. Cet ensemble de sèmes est la compréhension du mot chien.

Kip est un nom propre. Il désigne un individu de manière unique, sans passer par des sèmes. On dit qu'il est désigné en extension (le mot Kip a pour extension l'individu canin dont c'est le nom). C'est le mot chien et aussi le spécifique "bas sur patte" qui désignent le même individu en compréhension.

Quant à lui-même, il s'agit d'un pronom qui a la même extension que Kip, mais non par dénomination propre : par relation directe avec le locuteur (et son environnement), au moment de l'acte de parole. C'est par rapport au sujet parlant que Kip est lui et qu'il est cela même.

Compréhension et extension.
En logique, préciser l'extension du concept "triangle", c'est:
1 considérer l'ensemble des objets auxquels convient le concept "triangle"
2 préciser l'évolution et les différents sens du mot triangle
3 indiquer les différentes catégories de triangles
4 préciser l'ensemble des caractéristiques essentielles du triangle
Réaction 19


En logique, l'extension d'un concept est donc l'ensemble formé par tous les êtres, objets ou situations auxquels un concept peut s'appliquer. Par exemple, pour le triangle : les triangles isocèles, les élection triangulaires, les cas de triptyque hégélien (thèse-antithèse-synthèse), les pyramides, certains instruments de musique, des situations dramatiques comme celle mari-femme-amant, les outils de dessinateur qui permettent de tracer des angles droits (etc.) L'extension n'est pas la définition de toutes ces parties mais la quantité finie d'objets qui s'y rencontrent effectivement. (Pour rester pratique, on fera semblant que l'extension se limite à ce que les intervenants peuvent connaître.)
En logique, préciser la "compréhension" du mot oiseau, c'est ________.
1 considérer la totalité des êtres que recouvre le concept d'"oiseau"
2 rassembler les caractères de l'oiseau
3 relever les sens ou acceptions du mot oiseau
4 considérer les propriétés spécifiques des oiseaux
Réaction 20


On voit bien que la logique se spécialise dans la description des sèmes, donc de la compréhension, mais on sait aussi que le prédicat n'est pas le tout de l'assertion : il y faut un thème; et de la même façon un ensemble de sème qui constitue une compréhension a besoin d'une substance à laquelle s'appliquer, donc d'une extension (qui rassemble tous les référents possibles).
La nuit, tous les chats sont gris.


Cette extension maximale assure à la proposition son universalité, qualité essentielle en logique puisque les cas particuliers sont résolus d'emblée. (Or mon chat est noir, donc celui que tu as vu cette nuit pourrait fort bien être le mien). Si ce n'est pas la nuit, le chat gris n'est sûrement plus le mien.
Tu as vu quelques chats gris. Or mon chat est blanc. Donc tu n'as pas vu mon chat.


Voilà une proposition particulière (non universelle : le thème est un nombre limité de chats gris, pas tous) et une proposition négative (ce que tu as vu n'est pas mon chat). Quant à mon chat est blanc, c'est une proposition singulière (thème individuel). Plus loin, il nous faudra tenir compte de l'extension et de la compréhension pour assurer la validité des raisonnements.

S'il y a une multiplicité de sèmes dans les éléments définitoires (la compréhension) et une multiplicité de référents possibles dans l'extension, peut-on comparer ces deux quantités, pour se faire une idée plus précise du fonctionnement des concepts?
Si vous comparez l'extension et la compréhension des concepts "chat" et "carnassier" vous concluez que le concept de ________ que celui de ________.
1 "chat" a plus d'extension et plus de compréhension ..... "carnassier"
2 "chat" a moins d'extension et moins de compréhension ..... "carnassier"
3 "carnassier" a moins d'extension et plus de compréhension ..... "chat"
4 "chat" a moins d'extension et plus de compréhension ..... "carnassier"
Comparer les qualificatifs, du point de vue de la référence. La langue française / la ténacité française. Ils ont ________.
1 la même compréhension
2 la même extension
3 une compréhension différente
4 une extension différente
Réaction 21


Plus un terme contient de sèmes spécifiques, plus il s'éloigne (en compréhension) de celui qui ne contient que le sens fondamental.
Animal. Monture. Cheval. Destrier. Alezan.


Peut-on toujours ajouter des spécifiques, augmentant la compréhension, diminuant l'extension? Blaise Pascal, dans ses Pensées (#114), semble croire que oui.
La diversité est si ample, que tous les tons de voix, tous les marchers, toussers, mouchers, éternuers... On distingue des fruits les raisins, et entre eux les muscats, et puis Condrieu, et puis Desargues (un ami de Pascal qui avait une vigne à Condrieux), et puis cette ente. Est-ce tout? En a-t-elle jamais produit deux grappes [identiques]? Et une grappe a-t-elle deux grains pareils? Etc.




Le petit etc. permet sans doute d'aller jusqu'à la molécule, jusqu'au chromosome... mais en compréhension il y a un point d'arrêt : pour le cheval, ce serait le nom propre, par exemple Rocinante, le cheval de Don Quichotte. On peut cesser de diviser et spécifier quand l'extension (définie arbitrairement par proximité aux interlocuteurs) ne présente plus qu'une seule substance qui réponde à la définition. Le nom propre désigne un individu. Le mot individu veut exactement dire cela : "ce qui est indivisible» (logiquement).

Mais on a vu qu'avec le nom propre, on visait un référent, non une idée. Quelles sont les types de relation possibles entre les idées? Le sens d'un mot est composé de plusieurs sèmes. On comparera deux sens par la théorie des ensembles. Vous souvenez-vous d'avoir dessiné des patates empiétant plus ou moins les unes sur les autres? Quelles sont les relations possibles de deux ensembles?
Entre sphère et boule, il y a une relation d'______.
1 identité
2 inclusion
3 exclusion
4 intersection
Réaction 22


Voici donc cinq types de relation possibles, ni plus ni moins.



Identité, inclusion, exclusion, intersection, ...ou incompatibilité.

Les divers types de relations ensemblistes, tout spatiaux qu'ils sont, concernent, ici comme en mathématiques, des parties de réel perçu, conçu, conceptualisé. (Voir notamment la Logique sans peine du père d'Alice au pays des merveilles, Lewis Carroll). Ils concernent donc bel et bien des idées, comme la logique, pas tellement plus éternelles tout compte fait que nos impressions qualitatives, ou encore les réactions mesurables à l'aide d'instruments. Tout objet suppose un minimum d'analyse en genre et espèce dans cet espace invisible à l'oeil, qui sépare les notions à comparer (et à placer sur sa palette avant d'écrire). Ex. L'ARBRE est un «végétal», la FORÊT est un «ensemble» d'arbres ou un «lieu» planté d'arbres.

Les arbres sont dans les forêts (pas tous), mais l'idée "arbre" est-elle pour cela incluse dans l'idée (le sémème) "forêt"? (Ne pas répondre ici avant d'avoir revu les définitions, la liste des sèmes, de chacun de ces mots, qui doivent devenir nôtres pour être comparés dans leur sens.)
Entre arbre et forêt, il y a une relation d'______.
1 identité
2 inclusion
3 exclusion
4 intersection
Réaction 23


Il y aurait un rapport entre ARBRE et VÉGÉTAL (inclusion) ou entre ARBRE et PLANTE (exclusion). Si on considère les sèmes respectifs d'arbre et de forêt, on trouve des sèmes spécifiques communs comme «avoir des feuilles mortes», «donner du bois». Mais pas de générique commun. Donc il faudrait parler d'intersection. Il y a des sèmes exclusifs à chacun.
Il y a une relation entre un arbre et un fruit. On sait par exemple qu'un bon arbre porte de bons fruits. Mais y a-t-il une relation entre le concept "arbre" et le concept "fruit"?
1 Non. "Arbre" appartient au genre "végétal"; "fruit", au genre "organe".
2 Il y a une relation d'inclusion. L'arbre porte du fruit ou non.
3 Vu que l'arbre n'est pas le seul végétal à porter des fruits, il s'agit plutôt d'une relation d'intersection.
4 "Arbre" est inclus dans "végétal", "fruit" est en rapport avec "végétal" en tant qu'"organe", donc autrement. C'est une intersection.
Réaction 24


Quand il y a identité, on peut commencer à compter (une orange, deux oranges, etc.) Survient une poire, impossible de l'additionner comme orange, mais les oranges et les poires sont des fruits, on peut continuer à compter en parlant de fruits. L'addition est une opération qui doit porter sur des objets identiques conceptuellement.

Supposons une absence d'identité presque totale. Le revolver à cheveux blancs des surréalistes. Ou la montre molle. Pas même une intersection en vue. Ici intervient la relation d'incompatibilité. Les éléments sont dans des univers différents.

L'exclusion, elle, suppose un générique commun. PLANTE s'oppose à ARBRE parce que tous deux sont des «végétaux». Pour s'exclure l'un l'autre, ils doivent être du même genre, qui est comme leur espace logique, leur cadre. Si l'on compare ARBRE avec quelque chose qui n'a rien à voir, par exemple COMPÉTITION, il n'y aura pas de sème générique possible et dans ce cas, plutôt que d'exclusion (car, dans leur altérité radicale, les deux sont compossibles), on parlera d'incompatibilité (logique) : les sèmes de l'un ne pourraient entrer dans la définition de l'autre.
Entre cadet et aîné, il y a une relation d'______.
1 identité
2 inclusion
3 exclusion
4 intersection
Entre fleur et jardin, il y a une relation d'______.
1 identité
2 inclusion
3 intersection
4 (Autre chose)
Réaction 25


Il y a intersection entre deux sémèmes, d'une part lorsqu'ils ont chacun au moins un sème distinct, d'autre part lorsque leur sème commun n'est pas leur générique.

Ex. «Pomme» et «Canada» sont en intersection (sèmes distincts: «fruit» et «pays»; sème commun: «endroit de production» car la pomme doit en avoir un et le Canada en est un). Le sème commun n'est un genre pour aucun.

Par contre, «Renault 5» et «voiture de sport» sont en exclusion plutôt qu'en intersection parce que ces automobiles ont en commun ...d'être des automobiles (sème commun générique) et que donc elles s'excluent mutuellement (voiture de ville / voiture de sport).
Relation entre Esculape (dieu romain de la médecine) et eucalyptus (plante médicinale).
1 Inclusion.
2 Intersection.
3 Exclusion.
4 (Selon le sens)
Réaction 26


Quelqu'un ferait observer que la piqûre du serpent cause une maladie que peut guérir l'eucalyptus, cela rendrait-il caduque l'analyse précédente?
Réaction 27


Oui, puisque les termes seraient ainsi en intersection. Cela ne veut pas dire que la première analyse était "fausse" et que la seconde, maintenant, est "vraie". Ni que ces analyses sont indéterminées. Cela veut dire que la logique est un acte lié à celui ou celle qui l'effectue; autrement dit, qu'en employant le mot incompatibilité, le premier analyste n'a pas fait de rapprochement; tandis qu'en parlant d'intersection, le second en a fait au moins un.

Théoriquement, on résout ce problème en réservant l'exclusion à des termes dont le genre commun est aussi le «genre prochain» (le plus proche possible). Autrement, il suffirait de remonter au genre le plus élevé possible, celui de l'être, pour que toutes les incompatibilités deviennent des exclusions. Mais cette vision des choses est platonicienne. Elle ne tient pas compte de Hegel et des autres philosophes qui ont tenu compte de la Critique de la raison pure, où Kant entend mettre fin au monde des idées (en Dieu). Mieux vaut recentrer psychologiquement la logique et accorder à chacun la liberté d'opérer graduellement ses propres systématisations (à l'infini).

L'idéal, pour chacun, reste de tenir compte du plus grand nombre de faits possible et de les organiser avec le plus de subtilité et d'exactitude.
Dans la population des étudiants en théologie, on compte ici 30% d'hommes, 55% de femmes et 15% de prêtres.
1 Inverser l'ordre. 15%, 30%, 55%.
2 Remplacer hommes par laïcs.
3 Façon de parler justifiée par l'état sacerdotal, qui a un caractère à part.
4 (Autre chose)
Réaction 28


Inclusion ou division?

Pour qu'il y ait inclusion, faut-il que l'un des référents soit contenu dans l'autre, comme une de ses parties (la fleur, la tige et la feuille dans la plante)? ou bien que les deux dénominations soient dans un rapport de générique à spécifique, en sorte que ce sont les familles de plantes (rosacées, liliacées, ombellifères, composées, etc.) qui sont incluses dans le mot plante?
Réaction 29


Les familles sont incluses dans le générique, dont elles sont les espèces et les variétés. Ici, l'inclusion est aussi appelée division. Les plantes se divisent en rosacées, etc. Les végétaux se divisent en plante, arbre, arbuste, mousse. Le vivant se divise en animal et végétal.

Certes, on voit mal comment on pourrait avoir une fleur (au sens propre du mot, une vraie fleur, et dans sa réalité référentielle, comme chose) sans qu'il y ait une plante. Cependant toute plante ne porte pas de fleur, ni nécessairement de feuille ou de tige. La logique se heurte facilement à la diversité de la réalité. Le manchot, qui vit dans l'eau et nage pour pêcher est-il correctement classé comme oiseau? Difficile d'en faire un poisson pour autant. Et les fleurs de mer carnivores... Les espèces semblent se moquer de la logique mais la logique est capable de s'adapter à tout ce qui lui est apporté. La zoologie et la botanique restent les deux domaines où les subdivisions logiques ont le mieux réussi. Elles sont à peu près stables. Les autres sciences n'osent pas présenter d'arbre logique de leurs éléments. Les sciences de l'homme en reprennent sans cesse la définition ou se contentent de constater des usages. Ils sont tirés d'ouvrages célèbres... en attendant mieux. La logique est l'auberge espagnole de chacun de nous.

Vive la liberté et la réinvention constante des concepts et de leurs relations! Voici trois propositions. Une tenture d'un beau vert émeraude. Kip est un cocker. Ce sont des chiens irlandais. Dans laquelle voyez-vous un rapport d'inclusion?
Réaction 30


Vert est générique d'émeraude. Il y a d'autres verts. Il inclut émeraude.

Kip est un individu. Comme tout individu, il est le terme d'une division. Il divise cocker (ultimement). Il est donc inclus par lui.

Irlandais, comme nom de race canine, est un spécifique (de chien). Celui-ci l'inclut.

Les concepts se manifestent au passage des choses aux mots, ou des mots aux choses. On passe toujours par le concept : il est ce qui se grave en chaque personne, et il varie selon les "gravures" antérieures. Le degré de précision, et le nombre des référents (l'extension) varient. Ex. : Un enfant unique peut prétendre qu'il est «à la fois le cadet et l'aîné». Et il y aura des avantages comme des inconvénients à cette double prétention. Il pourra préférer prétendre qu'il n'est ni le cadet ni l'aîné puisqu'il n'y a personne avant ni après lui, et échapper ainsi aux inconvénients, mais perdre les avantages.

Et les quantités (dont s'occupent les mathématiques) pourraient donc appartenir à la logique?
(...) de même qu'il est des corps d'animaux, des corps humains, c'est-à-dire des assemblages de cellules dont chacun, par rapport à une seule, est grand comme une montagne, de même il existe d'énormes entassements organisés d'individus qu'on appelle nations (PROUST, à la recherche du temps perdu, t. XIV, p. 95). La quantité (grand comme une montagne, énormes entassements) ______.
1 est toujours concrète et donc exclue des définitions de mot.
2 est une idée et donc une qualité, mais toujours un virtuème.
3 s'oppose à la qualité et appartient à la substance à définir.
4 peut servir de sème spécifique, générique, et même de classème.
Réaction 31


Les quantités sont donc des qualités comme les autres et, pour débroussailler les problèmes, il convient de se demander à quel point de vue on se place. Le point de vue mathématique est intéressant parce qu'il est à la fois concret (les nombres sont des quantités) et abstrait (les variables peuvent être des choses différentes réunies d'un point de vue quelconque).
Voici quatre paires: A aquarium / poisson; B archipel / île; C syndrome / symptôme; D denture / dent. Le rapport des éléments entre eux est-il le même dans les quatre?
1 Oui.
2 Non. Il est différent pour A.
3 Non. Il est différent pour C.
4 Non. Il est différent pour D.
Réaction 32


Trouver le point de vue.

La logique gagne en précision pour qui a trouvé le point de vue approprié. Chacun pourrait établir progressivement son propre classement en constituant des séries. On prendrait la méthode, assez libre, des constituants immédiats, inaugurée plus haut (pour faire sa nomenclature).
Un (ou plusieurs) des objets suivants n'entre pas dans l'ensemble que forment les autres. "Fauteuil, canapé, chaise, divan, table à café, berçante."
1 chaise
2 table à café
3 canapé et divan
4 berçante
Soit l'ensemble des objets et des êtres suivants: téléphone, souris, moteur automobile, photographie, réveille-matin. Quel élément ne peut pas être rattaché aux autres?
1 téléphone
2 réveille-matin
3 photographie
4 (Autre chose)
Réaction 33


Règle. Dans un ensemble d'objets divers, on peut regrouper en un sous-ensemble les éléments qui ont en commun une même caractéristique.

Il a été déjà question de point de vue ci-dessus : pris sur les spécifiques, il donne les classèmes... Mais c'est ici dans un sens plus large, antérieur, que nous prenons maintenant cette expression. C'est inconsciemment qu'on réfléchit, avant de tout organiser de façon «claire et distincte». Pour discerner ou cerner le point de vue qui est le sien, pour le faire apparaître, on essayera notamment d'introduire des valeurs. Elles sont plus subjectives. Et de les nommer.
Voici quelques monstres mythiques : Gargantua, Héraclès, King Kong, Quasimodo, Samson. Ils ont été classés par ________.
1 férocité croissante
2 taille croissante
3 ordre chronologique
4 (Autre chose)
Réaction 34


En appliquant ce type de recherche à ce que l'on a rassemblé sur des fiches doc au hasard de ses lectures, il devient possible de découvrir, aisément ou laborieusement, le fil conducteur de sa propre démarche. D'aucuns se voient semblables à quiconque, négligeant, faute de la savoir possible, leur propre originalité. Mais ces analyses ne sont pas toujours faciles.
Dans la nomenclature suivante, trouver une identité, une inclusion une exclusion et une intersection. Alcoolisme. Alcoolique. Alcool. Drogué. Marijuana. Compulsif. Accro. Être sous la dépendance de.
1 Alcoolisme - alcoolique. Accro - drogué. Marijuana - alcool. Compulsif - Accro.
2 Compulsif - accro. Drogué - marijuana. Accro - être sous la dépendance de. Alcoolisme - alcoolique.
3 Être sous la dépendance de - compulsif. Accro - drogué. Alcool - marijuana. Alcool - alcoolique.
4 Accro - Être sous la dépendance de. Accro - drogué. Alcoolique - drogué. Compulsif - marijuana.
Réaction 35


Le degré d'abstraction...
Chers amis auditeurs, excusez-nous pour cette coupure ________, qui a interrompu nos émissions pendant quelques instants.
1 de courant
2 d'électricité
3 (Au choix)
4 (Selon le sens)
Réaction 36


L'emploi de courant, sans plus, au sens de «courant électrique» est une synecdoque généralisante (vue au module de sémantique).

L'abstrait peut se voir désigner par un substantif dérivé d'un qualificatif (ex.: les mots en -ité). Le concret a souvent une désignation plus substantielle (Ex.: le courant électrique).

Parfois le même mot reçoit une acception concrète ou abstraite suivant le contexte. Ex.: méninges, cervelle peuvent désigner l'intelligence. Définition. Synecdoque généralisante : «remplacement du terme propre par son générique ou un autre terme général». Ex. Avoir des animaux (pour «un troupeau de vaches»).
Rem. Le terme général est donc pris dans un sens plus spécifique ou plus concret que le sien. C'est une figure des plus fréquente dans les textes scientifiques et dans les titres, en vue d'accroître l'importance du sujet. Ex. Les Mots et les choses.

Dans l'expression la femme de Shakespeare, voyez-vous deux sens possibles, et tout différents, suivant le domaine?
Réaction 37


Dans le film historique où on voit le jeune dramaturge risquer sa vie pour les yeux de sa belle, il s'agirait d'une épouse interdite par les préjugés familiaux; mais, comme titre de recherche, la même expression sera beaucoup plus abstraite, elle visera les types de personnages féminins de l'oeuvre shakespearienne.
Comparez deux à deux les référents suivants. Dans quels groupes le second terme est-il plus abstrait que le premier? a) pomme, démocratie b) fruit, arbre c) homme, personne d) revendication, droit
1 a, b, c
2 a, c, d
3 b, c, d
4 (Autre chose)
Quel mot n'appartient pas à la même classe que les autres dans la série suivante: lyrique, épique, tragique, romantique, comique?
1 épique
2 comique
3 lyrique
4 romantique
Réaction 38


La proximité est donc une qualité sémique aussi. Le genre est proche des différences spécifiques. Il importe de partir d'analogons vraiment voisins et de même niveau d'abstraction si l'on veut arriver à des propositions claires. Sur l'échelle des énoncés (objet, idée, action, personne), on cherchera à situer les termes de sa nomenclature les uns par rapport aux autres, en établissant des degrés de proximité.

Établir des distances entre sèmes?

En prenant "extraordinaire" comme concept de départ, classez les suivants par éloignement croissant.
1 "Excellent", "étonnant", "excessif", "prodigieux".
2 "Prodigieux", "étonnant", "excellent", "excessif".
3 "Prodigieux", "excellent", "étonnant", "excessif".
4 (Autre chose)
Réaction 39


C'est en examinant son idée sur les termes, deux à deux, et en refaisant le classement jusqu'à obtenir des séries plus ou moins stables que l'on suscite en soi les concepts classificatoires pertinents dans sa vision du moment. La logique est une réalisation de soi dans les choses. Elle est toujours à recommencer mais certains de ses acquis finissent par être indéracinables, comme dans l'histoire des sociétés.

Types de relation entre éléments de nomenclature.

Pour faciliter le classement de la palette, et mieux tirer parti de chacun, on peut passer par les catégories d'Euler : identité , inclusion, exclusion, intersection, incompatibilité.

Dans le domaine de l'habillement, voici quelques couples à répartir selon ces cinq catégories. Par exemple, entre «chemisier» et «blouse», y a-t-il identité, exclusion, etc. Se poser la question pour chaque couple de notions et donne ici même son opinion personnelle.
A chemisier / blouse; B costume de bain / bikini; C châle / écharpe; D fichu / foulard; E ruban / mayonnaise; F chausson / chaussette; G socquette / chaussette; H fichu / résille; I robe / fronce; J dentelle / falbalas; K socquette / hauteur.

Réaction 40
A: identité; B : inclusion; C : exclusion; D : intersection; E : incompatibilité; F : exclusion; G : inclusion; H : intersection; I : intersection; J : intersection; K : inclusion ou incompatibilité?!


Que vient faire ici la mayonnaise? Est-elle dans le domaine du vêtement? Il y a deux sortes d'exclusions. Celle-ci est pure incompatibilité (pas de générique commun). La comparaison de tels termes oblige donc à considérer le domaine (ou le champ). Dès qu'on change de domaine, les mots peuvent prendre des acceptions nouvelles, comme on l'a vu danns le module d'introduction. Les incompatibilités ont donc pour fonction de faire apparaître les domaines.

Chausson / chaussette, est-ce bien une exclusion? Lexicalement, avec une racine commune et des suffixes opposés, oui; mais sémantiquement? D'autant moins qu'ils sont facilement confondus! Le sème commun est "couvrant le pied" et les différences sont "en feutre ou en tissu" et "en laine, ou une autre fibre". On voit, en tout cas, que les exclusions mènent tout droit à des définitions en compréhension. C'est leur propriété! Pour faire une définition, il faut trouver des analogons en exclusion. Les autres patates ont aussi leur emploi sémantique.

Les socquettes couvrent le pied. S'opposent-elles aux chaussettes ou bien sont-elles une division de ces dernières? Sans doute une division car il y a toutes les grandeurs : mi-chaussette, socquette, chaussette sport, mi-bas, bas trois-quarts... Ce sera donc une inclusion, car les inclusions favorisent les divisions.

Fichu / résille, par contre, n'offre ni genre ni référent commun. Le fichu est un vêtement qui couvre la tête, le cou, même les épaules alors que la résille, filet invisible, ne fait que tenir les cheveux. Ils se superposeraient et ne s'excluent ni dans la réalité ni comme concepts puisque la résille n'est pas un vêtement. Ils sont en intersection. Car ils se touchent partiellement, tout de même. Dans la réalité parce que les cheveux couvrent la tête. Comme concepts parce que le fichu aussi "maintient la chevelure". Mais ce n'est pour lui qu'un virtuème. Ce n'est pas spécifique. Et voici précisément à quoi servent les intersections : à dégager les virtuèmes, dont on sait qu'ils contiennent les propriétés. Les propriétés ne sont que les virtuèmes les plus significatifs. Les intersections débouchent donc sur les observations les plus prometteuses!

Fronce / robe, c'est aussi une intersection, car il y a une relation mais les fronces ne sont pas incluses dans l'idée ou la réalité des robes, elles ne les excluent pas non plus, mais il y a tout de même entre elles une certaine relation. C'est donc un virtuème. Pas une propriété, cependant.

Dentelle / falbalas. Toutes les dentelles sont-elles des falbalas? Pas nécessairement. Ni tous les falbalas ne sont des dentelles. Intersection donc virtuème. Propriété peut-être, mais ni omni ni soli ni semper : jugement de valeur plutôt. Significatif, par conséquent.

Curieux rapprochement de socquette et de hauteur: On aurait envie, à la fois, d'y voir une inclusion (la socquette a une certaine hauteur) et une incompatibilité (d'ordre conceptuel). Sommes-nous encore dans des choses comparables? Mais cette incompatibilité est ce qu'il y a de plus compatible puisque la hauteur réduite de cette chaussette-là est justement ce qui la définit comme socquette. Disons-le sans plus attendre : il s'agit d'un classème, c'est-à-dire de la désignation de la catégorie qui permet de trouver des sèmes (ici, spécifiques).

Définition et description.
Genres journalistiques: reportage, éditorial, article de fond, chronique, nouvelle, brèves, fait divers, courrier.
1 C'est une définition.
2 Simple énumération.
3 Ce sont les parties du sujet donc une «division».
4 Définition mais «en extension».
Réaction 41


Une bonne définition permet de comprendre la substance à définir dans ce qui la distingue. Elle doit être suffisamment ample (précise et complète). Il existe des définitions en extension, mais la liste doit être alors exhaustive. Il est habituellement préférable de passer à un concept abstrait pour être moins incomplet.

Faute d'arriver à définir, on se contente parfois de métaphores ou descriptions exemplatives.
«Le public, cette bête aux mille yeux et aux mille oreilles, qui attend sagement dans l'ombre, les deux mains sur les genoux.» (S. Chaput-Rolland) Il s'agit (la partie en gras)_________.
1 de spécifiques
2 de virtuèmes
3 d'une simple description
4 d'une métaphore
Réaction 42


Cet inconvénient se révélera ultérieurement un avantage car ce sont les jugements de valeur qui permettent de préciser les intentions des antagonistes. Mais ceci fait l'objet du module de problématique.

Voici comment procéder pour établir une définition vraiment logique.
«Le développement culturel des pays du tiers-monde est mal perçu, comme s'ils n'avaient pas droit à l'imaginaire.» Pour définir développement culturel, trouver (1) un analogon, (2) des sèmes communs et (3) des sèmes distincts.
1 (1) les ressources culturelles, (2) déploiement socio-économique, (3) essor des moyens d'expression
2 (1) la production artistique, (2) ce qui se vend, (3) ce qui est apprécié pour sa beauté
3 (1) la création littéraire, (2) les succès durables, (3) où la masse se reconnaît
4 (N'importe)
Réaction 43


Trouver les termes reliés....
Les pupilles, le miroir de l'âme, la cornée et le nerf oculaire sont des éléments qui se rattachent ________.
1 à la vision
2 aux yeux
3 au regard
4 (Autre chose)
Titre de pièce de théâtre: les quatre Morts de Marie. Morts veut dire ______.
1 que quatre personnes sont mortes
2 que Marie est morte quatre fois
3 (Selon le contexte)
4 (Autre chose)
Réaction 44


Mieux vaut partir des phrases existantes dans les habitudes culturelles, et les discuter ou les modifier progressivement par la suite. En tout cas, on évitera les deux extrêmes : s'y tenir scrupuleusement, ignorer leur existence.

La définition est d'ailleurs parfois une forme sans plus, qui ne définit pas vraiment. Elle véhicule toutes sortes d'affirmations ou de facéties. "L'homme est un loup pour l'homme" (plus animal, tu meurs). "Un spécialiste est quelqu'un qui est envoyé par sa société" (la fonction crée la compétence?)

Définition «oratoire».

On appelle oratoire ou rhétorique un procédé simulé, détourné de sa fonction initiale, utilisé dans cette forme pour un nouveau but.
"Si l'on doit s'entendre sur ce qu'est le jazz classique, disons que c'est une musique dont la liberté est limitée par la tradition." Il ________ du jazz classique.
1 y a, ici, une bonne définition
2 y a, ici, une définition contestable
3 n'y a pas ici de définition
4 y a, ici, une définition rhétorique sans plus
Réaction 45


Par ce biais de la forme, plus d'une définition introduit subrepticement un jugement de valeur. À ce titre, elles sont d'ailleurs utiles à la problématique. Ce qui remplace alors les spécifiques, ce sont de simples virtuèmes, vigoureusement connotés. On choisit les plus exclusifs. Cela permet de rejoindre plus directement le référent, tout en le décrivant d'avance. Nous retrouvons ici les propriétés. Il est précieux d'en avoir dans ses fiches doc.

Utilité des propriétés.

Quoique les propriétés ne soient pas des spécifiques (ce ne sont que des virtuèmes), elles conviennent particulièrement à leurs référents. Ils s'y retrouvent d'emblée.
Une fiche doc sur la mise en scène théâtrale se lit comme suit : Le montage alterné juxtapose des actions se déroulant en même temps jusqu'à la fusion finale. L'alternance est souvent plus justifiée par la dynamique du montage que par les nécessités dramatiques. «Justifiée par la dynamique du montage» est ______.
1 générique
2 spécifique
3 virtuème
4 propriété
Le swing est un balancement (1) rythmique (2) propre au jazz (3).
1 (1) générique, (2) spécifique, (3) virtuème
2 (1) spécifique, (2) générique, (3) classème
3 (1) spécifique, (2) générique, (3) propriété
4 (Autre chose)
Réaction 46


Ce qui est intéressant, avec les propriétés, c'est qu'elles se prêtent à des analyses qui font apparaître leur valeur. Elles ont été résumées dans une formule latine : omni, soli, semper. Ex. Les rayons égaux du cercle sont des propriétés de tous les cercles (omni = tous), seulement des cercles (soli = seuls), en toutes circonstances (semper = toujours). En revanche, «être bon médecin» est une propriété de l'homme ou de la femme, soli, mais pas omni, ni semper.

Les propriétés n'étant pas des éléments de définition, leur rapport avec ce qui est à définir est un peu particulier. Il ne s'agit ni d'inclusion ni d'exclusion. Et comme le rapprochement est typique, on parle de composition. La substance "compose" avec le prédicat de la propriété sa propre particularité (forme, couleur, etc.) Référent et propriété entrent en composition. Mais voyons les choses de plus près.

Division et composition.

La capacité des mots en ce qui regarde le fait de viser les référents à travers des sèmes a pour effet que la division peut s'opérer d'emblée entre spécifiques (Ex. Une majorité simple ou relative), ou en considérant les référents (Ex. Une majorité forte, ou une voix de majorité). La distinction est une question de contextualisation. Mais les prédicats ne font pas que diviser (leur générique) ou inclure (des parties de référents). Ils peuvent aussi multiplier (ou composer) leur contenu avec celui de la substance. Dans l'exemple classique : le roi de France est chauve, de quelle façon trouvez-vous que le prédicat chauve est appliqué au sujet roi de France?
Réaction 47


La calvitie ne fait pas partie de ses hautes fonctions. S'il lui manque des cheveux, cela n'a aucun rapport avec le contenu sémique de l'expression roi de France. Cela a beaucoup à voir avec la personne du roi actuel, par contre. Il y a composition quand le prédicat s'applique au référent comme tel et non aux sèmes de sa dénomination. La division s'oppose à la composition en ce sens que le contenu sémique de roi de France pourrait recevoir un type de prédicat de même ordre logique (Le roi de France était un puissant monarque, dont le territoire s'étendait jusqu'à la Meuse et à la Gironde).
On sait que le roi de France est grand allie "roi" et "grand" en jonction, tandis que le roi de France est chauve les allie en connexion. Il y a jonction sémantique du fait que c'est en tant que roi qu'il est grand, alors qu'il n'y a que connexion avec chauve. Quelles sont, parmi les noms de couleur qui suivent, celles dont les composantes sont en connexion?
1 Rouge tomate, gris souris, vert bouteille, bleu ciel.
2 Rouge vif, gris clair, vert acide, bleu électrique.
3 Rouge uni, gris indéfinissable, vert délavé, bleu sale.
4 (Au choix mais de préférence 1)
Réaction 48




Un autre exemple courant est : Ce médecin est excellent. Excellent médecin? Non! Excellent homme... Comment voyez-vous la relation entre excellent et médecin?
Réaction 49


Les concepts mis en relation, «médecin» et «excellent», sont d'abord mis en division (parmi les médecins, il y a ceux qui sont excellents, dont fait partie celui dont on parle, et il y a les autres). On dit aussi, en ce cas : il est excellent en tant que médecin. Il y a jonction des concepts, pour parler comme les linguistes américains. Ensuite, quand on bifurque vers excellent homme, ce n'est plus en tant que médecin qu'il excelle, le sens est «composé» (terminologie classique) ou en connexion (terminologie américaine).
Un athlète amateur de vin blanc... Amateur, dans ce contexte, ______.
1 n'est qu'un sème virtuel (qui entre en composition)
2 spécifie (et donc divise) athlète
3 est le générique
4 est une propriété omni sed non soli
Réaction 50


Il est ironique de constater que la notion classique de division ait été nommée jonction, donc à l'inverse, quand elle a été redécouverte. Ainsi, deux concepts mis ensemble à titre de générique et spécifique respectivement (par une copule comme être ou un lien syntaxique) peuvent s'allier (jonction) en tant que tout et partie respectivement (division).

La contradiction, propriété logique.

Outre les définitions et les propriétés, que peut-on faire à l'aide de concepts? Les nier! Trouver des contraires... Mais ils sont de plusieurs sortes.
Selon vous, la pensée critique et la pensée dogmatique sont deux types de pensée ______.
1 contradictoires
2 opposés
3 similaires
4 (Aucune de ces réponses)
Réaction 51


On peut tester la relation de deux termes en imaginant une relation inverse (par la négation).
Finalement, ce qui coûte le moins cher et qui rend le plus de service, dans la société, c'est ______.
1 l'intelligence
2 la connaissance
3 l'amour
4 (Autre chose)
Réaction 52


Et dans ce cas-ci, où y a-t-il des contraires?
"La loi mentionne-t-elle que même les pommes de terre et les légumes sont frappés de la surtaxe?" Cet énoncé implique ________.
1 une équivoque
2 une confusion
3 une erreur
4 (N'importe)
Réaction 53


La contradiction comme feinte rend le texte intéressant car elle peut créer des paradoxes.
Soit la définition suivante: "Une éponge est formée d'un ensemble de petits trous". Selon vous, il y a là ________.
1 Une contradiction
2 Une comparaison
3 Une opinion
4 (Autre chose)
Réaction 54


Nous voici assez aguerris dans les analyses trapézoïdales (mots / choses / concepts) pour faire un pas de plus, à l'occasion de la négation et des oppositions qu'elle suscite. Celles-ci frappent non seulement les sémèmes et les sémantèmes (les sommets du trapèze) mais les propositions, les actes de parole. Ici la logique va prendre son essor en tirant cette fois d'un ensemble de phrases une vérité nouvelle. Nous allons parler, vous l'avez compris, du raisonnement. Il est le chef-d'oeuvre de la logique du fait qu'il conduit à une conclusion, c'est-à-dire à une vérité nouvelle.

Mais comment fonctionne la pensée? Dans l'abstrait seulement? Que se passe-t-il si l'on essaie de nier un acte prédicatif? Passe-t-on du vrai au faux? Ou, si on était dans le faux, suffit-il de nier pour se trouver dans le vrai? Le poète Henri Michaux soutient que "même si c'est vrai, c'est faux". Aucun logicien ne peut le suivre dans ce paradoxe, où tout serait à nouveau confondu. La logique vise à la clarté. Une proposition doit avoir une "valeur de vérité" que sa négation inverserait, non?
Réaction 55


Certainement. C'est le fondement de toute la logique : aristotélicienne, majeure, cartésienne ou moderne.

Toutefois, à partir de l'opposition du vrai et du faux, les traités de logique distinguent fort utilement trois types d'oppositions entre les actes de parole : les propositions contraires (Tout est noir / tout est blanc; ou : la terre est noire / la terre est blanche), les contradictoires (Tout est noir, la terre est blanche) et les subalternes (Tout est blanc, la terre est blanche). C'est le "carré logique d'Apulée" (auteur d'un roman latin célèbre : l'âne d'or). Exemple.
CARRÉ logique Affirmative Négative
Universelle La généalogie intéresse de plus en plus les familles.(A) La généalogie intéresse de moins en moins les familles.(E)
Particulière Ta généalogie intéresse de plus en plus ma famille.(I) Ma généalogie intéresse de moins en moins ma famille.(O)


On peut alors "calculer" la vérité relative des propositions de ce carré, deux à deux, selon leur type. La particulière affirmative réfute l'universelle négative : I et E sont contradictoires. De même la particulière négative réfute l'universelle affirmative. O et A sont contradictoires. (Vous prenez la peine de vérifier par les exemples ci-dessus.) Les contradictoires sont nécessairement incompossibles (si l'une est vraie, l'autre est fausse).

Les subalternes (A et I, ou bien E et O), par contre, sont nécessairement compossibles (les deux sont vraies ensemble). Les deux particulières (I et O) sont dites subcontraires parce qu'elles peuvent être vraies en même temps, même si elles sont contraires (l'une négative, l'autre affirmative). Deux universelles ne le peuvent pas mais elles peuvent être fausses en même temps (si l'une de leurs particulières est vraie).

On voit que la négation inverse la valeur de vérité mais qu'il faut tenir compte de la "quantité" des propositions. La substance est un simple échantillon : la proposition est alors particulière. La substance réunit-elle toute la "classe" : la proposition est alors universelle. La
La mer est bleue. Quelle est la contradictoire de cette proposition?
1 La mer n'est pas bleue.
2 Les mers ne sont pas bleues.
3 (Il n'y a pas de contradictoire.)
4 (Cela dépend)
Les femmes sont plus gentilles que les hommes. Quelle est la proposition contraire?
1 Les femmes sont moins gentilles que les hommes.
2 Les hommes sont plus gentils que les femmes.
3 Les femmes ne sont pas plus gentilles que les hommes.
4 (N'importe)
Les conquérants ne sont pas de grands hommes. Par rapport à cette proposition, quelle est la position logique de la proposition suivante : Napoléon était grand.
1 C'est une proposition contraire.
2 C'est la contradictoire.
3 C'est la subcontraire.
4 (N'importe)


Tout cela doit donc être appliqué avec doigté. Comparez : Je sais tout. / Je ne sais rien. Est-ce compossible? Et si on prend les particulières? Comparez : Je sais qqch. / J'ignore qqch. Et les singulières? Comparez : Je sais cela / Je ne le sais pas.
Réaction 56


Les contraires universelles sont incompossibles. En rendant particulière l'une des deux propositions, on obtient des contradictoires : Je sais qqch. / Je ne sais rien. Ou encore : Je sais tout cela / je ne sais pas cela.

La vie courante offre des cas moins simples. Si je dis : J'ai le plaisir de le connaître est-ce le contraire de Je n'ai pas le plaisir de ne pas le connaître? Ou bien est-ce la même chose? Que se passe-t-il, en d'autres mots, quand on déplace la négation d'un membre sur l'autre. Y a-t-il une contradiction entre les deux propositions?
Réaction 57


J'ai le plaisir de ne pas le connaître et Je n'ai pas le plaisir de le connaître sont des propositions contraires distinctes valables dans les deux cas. Le système se complique. Dans le quotidien, tout est toujours plus subtil qu'en logique. Encore, s'il n'y avait que l'ordre logique pour percevoir notre place dans le monde! Car il y en a encore trois autres : l'ordre causal (pour les phénomènes), l'ordre historique (pour les actions) et de l'ordre préférentiel (pour les personnes). Nous ne traiterons dans ce chapitre que de l'ordre causal, parce qu'il est proche de la logique mais les autres sont trop importants pour ne pas se retrouver plus loin sous différentes formes.

Causalité.

Dans les sciences, la causalité est très recherchée, du point de vue méthodologique mais aussi du point de vue technique car elle permet une intervention, indirecte mais efficace.
--- Il n'a pas cessé de pleuvoir en septembre parce qu'il avait plu le 3. Le 3 fait le mois! --- Allons donc! Il n'y a aucune relation causale ici... ________.
1 Ce n'est qu'une façon de parler
2 C'est un hasard
3 Ce n'est qu'une cause partielle
4 C'est dû aux circonstances
Réaction 58


Causalité ou simple consécution? Pas toujours facile à déterminer... On voit déjà, pour mieux définir la causalité, que celle-ci se montre dans une simple consécution, mais qu'elle y ajoute comme une relation d'efficience, d'opération nécessitante.
Voici quatre couples de substantifs: a) miel / abeilles b) glace / froid c) S.O.S. / détresse d) feu / incendie Est-il possible d'établir des relations causales entre eux? Ces relations sont-elles "réciproques" (possibles dans les deux sens: biunivoques)? Imaginez des contextes permettant d'énoncer de telles relations. Dans quel cas n'y a-t-il pas la moindre relation réciproque vraisemblable?
1 Aucun cas.
2 Tous les cas.
3 a)
4 a), d)
Réaction 59


La causalité est souvent implicite dans le discours. Elle découle de son déroulement. L'ordre d'introduction des sèmes a plus d'importance qu'on ne croirait logiquement.
Les ânes braient. Il pleut.
1 Description d'événements simultanés.
2 Ordre causal. La pluie est la conséquence du braiement.
3 Ordre chronologique mais simple coïncidence.
4 La pluie est la cause du braiement.
Ils furent heureux. Ils eurent beaucoup d'enfants. Le sens est-il modifié si on inverse l'ordre de ces deux propositions?
1 Non. Il s'agit de deux événements qui se produisent simultanément.
2 Non. La seconde est la cause de la première. Inverser rétablit l'ordre chronologique.
3 Oui. Ce n'est pas un raisonnement mais une suite d'événements.
4 Oui. Inverser fait de la conséquence une cause.
Réaction 60


Il nous semble que, dans ce cas-ci, la modification de sens est liée à l'ordre des propositions du fait qu'il y a une implication (la sexualité, la vie familiale). Qu'est-ce que l'implication? La présence dans une proposition d'une autre proposition, non exprimée, implicite parce qu'elle découle de la première. On peut voir l'implication comme une sorte de causalité, purement cognitive. De la connaissance de quelque chose, on tire la connaissance d'autre chose. Exemple.
Indiquez le rapport logique prédominant: "Si Louise n'a pas déménagé, elle est encore chez sa mère."
1 Consécution.
2 Causalité.
3 Implication.
4 Exclusion.
Réaction 61


L'implication s'exprime par si ... , alors... Pour l'expliciter jusque dans ses bases énonciatives, il faudrait la gloser ainsi : Si (il est vrai que) ... alors (il doit être vrai que)... Elle est à la base de beaucoup de raisonnements.

Ce sont des raisonnements courants et qui s'expriment clairement en des formulations diverses.
«Le refus patronal de nous accorder notre augmentation de salaire implique du mépris pour les ouvriers.» Le mot implique, pris au sens strict de la logique, ________.
1 convient ici
2 devrait être remplacé par suppose
3 devrait être remplacé par cache
4 devrait être remplacé par entraîne
Réaction 62


Pour que l'implication logique soit présente, il faut que le si... alors... n'ait qu'une valeur cognitive, que l'on travaille au niveau des sèmes. Toute induction n'est donc pas une implication.
Les poissons ont aussi leurs caprices. Ils détestent le vent. "Ça nous énerve de voir se rider la surface de l'eau" disent-ils.
1 Induction.
2 Élucubration.
3 Divagation.
4 Analogie.
Réaction 63


Pour rester dans les limites du vraisemblable, vu les possibilités presque illimitées des inductions de tous ordres, un moyen simple : travailler sur du réel attesté, donc sur vos fiches doc. Bien entendu, il en faut un choix suffisamment représentatif du domaine dans son ensemble, donc il faut avoir parcouru tous les genres de publications disponibles et avoir relevé tout ce qui pouvait vous intéresser (on s'arrête quand il commence à y avoir redondance entre les fiches). Pour le travail final de ce cours, une dizaine de livres dépouillés et une centaine de fiches (ceci dit pour vous donner une idée de ce qu'il reste à faire indépendamment des leçons) nous semble (a priori) un minimum. raisonnable. Où figureront tant de réflexions logiques? sur les fiches doc? - Sur des fiches synthèse, qui portent ici fort bien leur nom. La synthèse aussi est une opération logique. Elle recouvre tous les genres d'induction et de déduction.

Synthèse.

Une fois les concepts de votre domaine bien établis, vous pouvez faire des couples et voir s'ils produisent du fruit. C'est ce que le philosophe de l'Esprit en marche, Hegel, au début du XIXe siècle, a popularisé sous le nom de synthèse.
Lequel des groupes suivants ne présente pas vraiment les étapes de ce qu'Hegel appelle un mouvement dialectique (thèse / antithèse / synthèse)? Exemple classique d'un tel mouvement: le capitalisme est la thèse, la prolétarisation est l'antithèse, le communisme est la synthèse (selon Marx).
1 chaud / froid / tiède
2 poisson / femme / sirène (animal fabuleux)
3 être / pensée / action
4 Na / Cl / NaCl (sel de table)
--- As-tu déjà remonté le chauffage? --- Mets-le à 20 degrés.
1 Feu vert.
2 Hyporéponse.
3 Ignoratio.
4 Synthèse.
Réaction 64


La synthèse peut résoudre les antagonismes. Elle aussi doit tenir compte de l'ordre d'introduction des propositions.
Dans ses Idylles (XV,36), Théocrite (-300) écrit: «Pour qui ne travaille pas, c'est tous les jours fête». À quoi tend son affirmation?
1 Vive le chômage!
2 Éloge de la paresse.
3 Le repos vaut mieux que le travail.
4 Il ne faut pas être triste de manquer de travail.
Réaction 65


Revenons aux implications de la disposition séquentielle des propositions. L'introduction d'un sème avant ou après les autres est un élément déterminant pour son intégration dans l'acte de parole. Ex. Aimer les livres et beaucoup réfléchir / Réfléchir et aimer beaucoup les livres. Rien mais gras / Gras mais rien. L'ordre débouche sur un sens, une direction qui laisse entrevoir une conclusion.
(1) Elle apprend qu'elle a un cancer du sein. (2) Elle met alors toute sa confiance dans l'équipe du docteur Morin. Quelle place attribuer aux deux épisodes suivants: (3) Quels moments éprouvants! (4) Elle ne peut compter sur son compagnon.
1 À la suite des deux premiers. Donc: 1 2 3 4.
2 4 3 1 2
3 1 4 3 2
4 1 3 4 2
Réaction 66


Ce que montre la présence d'un ordre, c'est qu'il y a un raisonnement implicite. Implicite, mais tellement présent qu'on le reconstitue sans trop de peine. Les logiciens de l'Antiquité ont donné au raisonnement une forme précise, celle du syllogisme.

Le syllogisme.

C'est le raisonnement logique développé dans toute sa splendeur, sans crainte d'une triple répétition. Ex. Les hommes sont mortels. Or Socrate est un homme. Donc Socrate est mortel. D'après votre expérience, est-il parfois utilisé dans la vie courante, personnelle ou publique?
Réaction 67


On dira que non si l'on pense à sa forme canonique, développée, mais il a une forme réduite, l'enthymème, qui est au contraire tout à fait courante. On se contente, en fait, de l'une des trois propositions et tout le monde devine aisément (de plus, au lieu de vérifier si le raisonnement se tient, on se demande seulement si on est d'accord, en sorte que là aussi le syllogisme apparaît comme peu nécessaire). Ex. Socrate est condamné à boire de la ciguë car «il corrompt la jeunesse d'Athènes». À ce propos, quelqu'un déclare: «Tous les hommes sont mortels». Ce n'est que la majeure (première proposition, universelle) du syllogisme. Elle suffit. Tout le monde aura compris que cela voulait dire : «Socrate peut bien mourir, quelle que soit la valeur de son enseignement».

On peut aussi répondre immédiatement et, sans faire de syllogisme, rétorquer: «Sa pensée ne mourra pas». Cette réplique est-elle une réaction affective, ou bien un enthymème?
Réaction 68


Quel genre de raisonnement pourrait-on faire, dont la conclusion serait l'immortalité de cette profonde "pensée", qui fut celle de Socrate, et qui se résume d'ailleurs dans un paradoxe étonnant (Je sais que je ne sais pas)? La pensée relève de la logique. Mais pourquoi la logique ne mourrait-elle pas? Ce qu'on veut dire, c'est du moins qu'elle ne mourra pas avec Socrate. Je pense, donc la logique ne meurt pas. Il y a bien un raisonnement dans cette réplique. Elle est aussi un enthymème.

La recherche des raisonnements implicites (et les moyens d'en faire la réfutation) se trouve plus loin, au chapitre de l'argumentation. La nature rationnelle des échanges humains abonde donc en enthymème, condensés de raisonnements. Suffit-il qu'il y ait un raisonnement pour que ce soit vrai?
«C'est par des voleurs que Pasolini s'est fait assassiner. Mais on sait qu'en Italie, tout est politique. C'est donc l'engagement de Pasolini contre la gauche qui doit être considéré comme la cause de sa mort.» (Un commentateur politique).
1 Faux raisonnement.
2 Raisonnement logique mais la mineure, universelle, est fausse.
3 La mineure est vraie mais la conclusion manque de preuves.
4 (N'importe)
Réaction 69


Autre exemple. Voici un extrait d'un traité d'orthophonie (Schwartz F. et Dr Martin, 1997, p.116. Chapitre sur le bégaiement).
On considérait à cette époque que la compréhension du problème n'avait aucun rapport avec la thérapie, ou était sans importance. (A)
Évidemment, de nombreux cliniciens ne comprenaient pas pourquoi certaines thérapies réussissaient ou non, (B)
mais eux-mêmes avaient appris leur technique thérapeutique par coeur. (C)


Ces trois assertions peuvent-elles former un syllogisme? Laquelle serait la conclusion? Et la majeure? Et la mineure?
Réaction 70


Il est souvent plus facile de commencer par la fin : trouver ce qui doit être prouvé, et qui deviendra la conclusion. Le paragraphe se divise en trois parties (A,B,C) mais C n'est pas nécessairement la conclusion. C est factuel et semble donc devoir être plutôt à une preuve. C'est parce qu' ils appliquent par coeur des techniques que les causes du succès ou de l'échec leur échappent. Mais qu'ils ne comprennent pas, B, est aussi plutôt un fait. Faut-il prendre A comme conclusion malgré son allure déclarative?

Essayons de réécrire A comme conclusion. Donc...on considérait à cette époque etc. Cela pourrait aller. Que deviennent B et C? Lequel est assez universel pour servir de majeure? «Évidemment... etc.»? Un opérateur comme : Tout le monde sait que... Chacun sait, ... Manifestement, ... Il est évident que... Sûrement que... introduit une généralisation. Bon début mais il y a une objection plus loin. La phrase ne parle que de nombreux cliniciens, pas de «tous». Or il faut tous pour avoir une universelle. Heureusement, on peut penser que nombreux tend vers tous car la conclusion aussi suppose qu'on ne fait pas d'exception. On peut tenter de bâtir une universelle en spécifiant. On aurait : Les orthophonistes qui ne maîtrisent pas la théorie... (tous ceux-là) par exemple. Voilà une universelle bien commencée. ...ne comprennent pas (au présent, pour garder la généralité) le succès ou l'échec de certaines thérapies.

Il n'y a plus qu'à mettre C comme mineure. Or... ils ont appris leur technique thérapeutique par coeur. La conclusion mérite aussi un remaniement. Donc... le par-coeur dans la technique empêche de comprendre et de soigner en connaissance de cause.

Fignoler quelque syllogisme demande certes un effort soutenu mais quelle clarté, en revanche, n'en reçoit-on pas! Que pensez-vous de ces trois syllogismes-ci?

«Les sorciers, quand ils sentent leur dernière heure se rapprocher, se mettent en quête d'un successeur à qui transmettre leurs pouvoirs.» Peut-on extraire de ceci un syllogisme?
1 Majeure : Tous les sorciers doivent transmettre leurs «pouvoirs». Mineure : or il y en a qui sentent venir leur heure dernière. Donc : ils vont se mettent en quête d'un successeur.
2 Majeure : La sorcellerie comporte des pouvoirs qui ne se transmettent que par transfert direct. Mineure : Or il y a un sorcier qui se cherche un successeur. Donc : il doit sentir sa mort prochaine.
3 Même majeure. Or il y a des sorciers qui sentent venir leur mort. Donc ils se mettent en quête d'un successeur.
4 (N'importe)
Réaction 71


Mettre un raisonnement sous forme de syllogisme permet de vérifier la conclusion, à condition que les prémisses soient vraies. Ex. Trenet a toujours été jeune. Or il est mort à 87 ans. Donc on peut mourir jeune.
Ici, la majeure universelle. La mineure a le même thème (Trenet) et elle est particulière, ce qui est normal pour une mineure. Pourtant le paradoxe est spécieux. On le dénoue en modifiant la conclusion (Donc on peut être jeune à 87 ans). On argumentera que ce n'est même pas nécessaire puisqu'on peut mourir à tout âge mais il faut voir dans quel sens est employé ici le mot jeune. Dans ce sens-là, le syllogisme est vrai.

Et la poésie, n'a-t-elle rien à voir avec les syllogismes?
Même une définition purement poétique peut-elle entrer dans un syllogisme? Quelle place pourrait y prendre ce vers bien connu de P.-J. Toulet :«Les violettes sont le sourire des morts»?
1 Majeure. C'est une universelle.
2 Mineure. On peut en faire la particulière d'une majeure comme suit :«Les violettes sont des fleurs», ce qui donne la conclusion (3e figure) :«Donc quelque fleur est le sourire des morts».
3 Conclusion. La nouveauté de l'image est à expliciter dans les prémisses (charme de la fleur, sa relation avec les disparus).
4 (Au choix mais de préférence 3)
Réaction 72


Tout poétique qu'il soit, le vers est d'une logique vérifiable mais inductive. La conclusion est donc un peu particulière et sa forme universelle n'est qu'une forme.
Mais pour le logicien antique ou médiéval, ou leur disciple d'aujourd'hui, c'est la forme du syllogisme qui doit porter sa vérité, c'est-à-dire du moins sa cohérence logique. On a identifié des «modes», une vingtaine, et ils ont pu être réduits à trois.
Quelle est la forme de syllogisme la plus «simple»? Tout légume donne du jus. Or _____.
1 le navet est un légume (Donc le navet donne du jus.)
2 l'olive donne de l'huile et non du jus (Donc l'olive n'est pas un légume.)
3 certains légumes ne peuvent être consommés crus (Donc, certains jus ne peuvent être consommés.)
4 (Autre chose)
Réaction 73


Ces trois figures sont possibles. Tout dépend de l'assertion à traiter. Quand on donne une raison (enthymème de figure 1), on implique un syllogisme qui aboutit au même prédicat mais prend comme thème un fait non mentionné (cas d'espèce). Quand on donne une preuve (enthymème de figure 2), on implique un syllogisme qui aboutit à la négation, pour la substance, d'une qualité implicite (à reconstituer dans une raison). Quand on prend position (enthymème de figure 3), on particularise une idée par rapport à une autre.
Il devient par là possible, en procédant avec méthode, de bâtir sur toute assertion un raisonnement logique complet. On tiendra compte de la place qui convient à chaque type d'assertion (majeure universelle, mineure particulière, conclusion engagée) et de la place d'un moyen terme (prédicat-thème, deux fois prédicat, deux fois thème).

La «figure 1» réussit à attribuer une vérité générale. La 2 distingue entre des substances voisines. La 3 distingue deux attributs. Comme on va le voir ci-dessous, le fonctionnement de ces figures est toujours de passer par l'intermédiaire d'un «moyen terme» : celui que la conclusion ne reprendra pas mais qui aura permis de passer de la majeure à la mineure car il figure dans les deux. C'est sa position comme thème ou prédicat dans la majeure ou dans la mineure qui détermine chaque figure.
«Vous tous, voleurs, bandits, arracheurs de cervelle, je vous nomme sans distinction les vaillants Oufficiers de notre Armerdre!" (Ubu enchainé, IV.vii) Bâtir des syllogismes. Quel est, non pas celui avec lequel vous vous sentez le plus en accord, mais celui qui est le mieux construit, celui dont le contenu et la forme sont le plus appropriés l'un à l'autre?
1 Jarry fait dire à Ubu : ... Or ce n'est pas un innocent jeu de mots. Donc, il attente à l'honneur de l'armée. (On en fait une majeure.)
2 Pas de discipline sans respect de ceux qui représentent l'autorité. Or Jarry fait dire à Ubu : ... Donc il cherche à saper le moral des troupes. (On en fait une mineure.)
3 Une réalité qui surpasse la raison est l'objet de la recherche surréaliste. Or il y a un fondement rationnel à la discipline militaire. On voit donc Jarry etc. (On en fait une conclusion.)
4 Il faut être ivre pour contester le bien fondé de la discipline à l'armée. Or Jarry fait dire à Ubu etc. Donc il écrivait en état d'ébriété. (Mineure)
Réaction 74


Bâtissez votre syllogisme. Choisissez une des assertions de votre fiche, trouvez la place qui lui convient (majeure si c'est une universelle, mineure si c'est un fait, conclusion si c'est une prise de position) et cherchez un moyen terme selon une des trois figures. Passons à la pratique. Choisissez une de vos fiches doc et transcrivez-la ici.
Réaction 75


Voyons plus en détail la figure 1 des syllogismes : moyen terme thème puis prédicat, majeure universelle et mineure affirmative. Ex. Nul homme n'est ruminant. Tu es homme. Tu ne peux ruminer. On montre ainsi que les variétés ont les attributs de leur genre. Est-ce le modèle que vous aviez retenu? Pouvez-vous l'appliquer à votre fiche doc?
La logique est-elle nécessaire à l'écrivain? Non, puisqu'il faut avoir une certaine logique pour se faire accepter par la société. Un être complètement illogique est mis à l'écart. Donc, la logique n'est pas inutile pour un écrivain. On reconnaît dans ce raisonnement les parties d'un syllogisme : majeure universelle, conclusion particulière. Mais quelle est la mineure?
1 Un être complètement illogique est mis a l'écart.
2 Un écrivain doit se faire accepter par la société.
3 Un écrivain ne peut pas être complètement illogique.
4 (Autre chose)
Réaction 76


Les deux autres figures ont le moyen terme comme attribut (figure 2) ou comme thème (figure 3). Dans la figure 2, le moyen est attribut deux fois mais une des prémisses doit être négative et la conclusion le sera aussi. Comme toujours, la majeure doit être universelle. Ex. «Le pouvoir s'exerce sur le court terme. Or les intellectuels doivent penser dans le long terme. Donc le pouvoir les corrompt.» On montre ainsi que si les thèmes n'ont pas les mêmes attributs, ils ne peuvent être du même genre.
Votre fiche doc permet-elle de monter un raisonnement formel de figure 2?
«Les chats sont mortels. Or Socrate est mortel. Donc Socrate est un chat.» Ainsi raisonne Ionesco pour ridiculiser le syllogisme. Mais pourquoi celui-ci n'est-il pas réussi?
1 Le moyen est attribut deux fois mais pas de la même façon (pluriel et singulier).
2 La conclusion n'est pas négative.
3 Les deux prémisses sont positives.
4 (2 et 3)
Réaction 77


Pour terminer, voici un syllogisme de figure 3, où le moyen est thème deux fois. Majeure universelle et mineure particulière. Ex. La divisibilité de la matière à l'infini est incompréhensible. Elle est incontestable. Il y a donc des choses incontestables qui sont incompréhensibles. On indique par ce type de raisonnement formalisé que les qualités de la majeure ne sont pas incompatibles avec celles de la mineure.
Que donnerait ce schéma dans le cas de votre fiche doc (toujours la même, mais vous pouvez ajuster la proposition : en faire une universelle, un particulière, un négative...)?
L'Amérique est une démocratie. Or l'Amérique refuse de se soumettre à l'autorité de la Cour Internationale de Justice. Il y a donc une démocratie qui refuse de se soumettre à l'autorité de la Cour Internationale de Justice.
1 Syllogisme vrai du fait que la majeure est universelle.
2 Syllogisme vrai du fait que le moyen terme est deux fois sujet.
3 L'attribut de la majeure peut aussi bien devenir thème que prédicat de la conclusion.
4 Il faudrait plutôt conclure : Donc un des pays qui refusent (etc.) est une démocratie.
Réaction 78


Les figures peuvent en outre se caractériser par leur fonction. La «figure 1» sert à attribuer à une substance une autre qualité, plus générale. La 2 permet de distinguer nettement entre deux substances, assez voisines. La 3 réussit à bien établir ce qui diffère, entre deux attributs.
Comme on l'a vu ci-dessus, le fonctionnement de ces figures est toujours de passer par l'intermédiaire d'un «moyen terme» : celui que la conclusion ne reprendra pas mais qui aura permis de passer de la majeure à la mineure car il figure dans les deux. C'est sa position comme thème ou prédicat dans la majeure ou dans la mineure qui détermine chaque type de syllogisme et son effet.
Quoi qu'il en soit, la forme n'est qu'une occasion de clarifier. Elle ne garantit pas toujours le résultat... Si vous avez monté un syllogisme faux, lors des essais précédents, essayez de l'exposer. On essaiera de vous aider à trouver l'erreur : c'est un des meilleurs moyens d'acquérir la capacité de formaliser le raisonnement.
Un syllogisme peut être faux de deux manières: ou bien la conclusion ne ressort pas des prémisses (défaut de forme); ou bien les prémisses sont fausses (défaut de matière). Dans les deux cas, le syllogisme est faux, donc tous les syllogismes sont des sophismes, c'est-à-dire de faux raisonnements.
1 D'accord.
2 On vient de faire une généralisation hâtive.
3 On a ici une réfutation par dilemme.
4 Il y a erreur due à un préjugé.
Réaction 79


Le syllogisme ci-dessus aurait été vrai avec la conclusion suivante : «Donc un syllogisme est excellent quand la conclusion ressort rigoureusement des prémisses et qu'elles-mêmes sont valables». Nous reviendrons plus en détail sur la composition de syllogismes (au module 12).

Inverse et converse.

Le maniement des propositions comprend deux interventions qui conservent la valeur de vérité. Ce sont la double négation (proposition «inverse») et la permutation (proposition «converse»).
Définitions Inverse: Proposition où le contenu du thème, mais également le contenu du prédicat, sont inversés. On garde la même valeur de vérité. Converse: Proposition qui a pour thème son prédicat et pour prédicat son thème. Sens et valeur de vérité peuvent subsister.
Ex. Un carré est une figure géométrique à quatre côtés égaux et à angles droits. Inverse: Un rond n'est pas une figure géométrique à quatre côtés égaux et à angles droits. Converse: Une figure géométrique à quatre côtés et à angle droits est un carré.


Prenons la proposition : Le gugusse est un clown trop naïf. Quelle serait l'inverse? Et la converse?
Réaction 80


Les clowns qui ne sont pas des gugusses ne sont pas trop naïfs (ils se montrent subtils). Un clown trop naïf, c'est le gugusse. Autre bonne réponse : Un gugusse n'est pas un personnage austère et méfiant. Le clown trop naïf est un gugusse.

Il fallait limiter la négation. Un non-gugusse ne doit pas être tout ce qui n'est pas un gugusse dans l'univers entier. On retrouve ici l'exclusion et l'incompatibilité, distinguées plus haut. Nier c'est exclure. Il faut un espace commun : le générique dans le cas des définitions. Donc il fallait ajouter clown.

Autre exemple.
Mon poisson rouge me parle. Quelle est l'inverse? Et la converse?
1 Les poissons ne parlent pas. Tout ce qui parle vit hors de l'eau (n'est pas poisson).
2 Mes autres poissons ne me parlent pas. C'est mon poisson rouge qui me parle.
3 Mon poisson bleu ne parle pas. Parler est possible pour un poisson.
4 Un non-poisson rouge ne parle pas à une personne. Ça parle, un poisson rouge.
Réaction 81


Vous pouvez chercher les points faibles des autres distracteurs (et les faire commenter par votre tuteur).
Vous aurez remarqué que le mot inverse est ici pris dans un sens très précis, strictement logique. Pour spécifier qu'il n'est pas pris au sens courant, on le remplace par obversion. Car la converse est aussi une variété d'inversion au sens large, et même la simple négation.
Mais qu'arrive-t-il si l'un des termes est déjà négatif ? L'obversion peut-elle le ramener à la forme positive? Prenons la définition suivante : l'incartade est un écart de conduite sans gravité. L'obversion donne Ce qui n'est pas une incartade est un écart de conduite qui n'est pas sans gravité. Y a-t-il un mot ou une expression positive correspondant à ces doubles négations ? Le mot cartade n'existe pas plus que le mot solite comme complémentaire nié pour insolite. (De toute manière, incartade est de la famille du mot quarte, qui vient du domaine de l'escrime, et son in est une préposition). En revanche non sans gravité = grave, à peu de chose près. Ce qui n'est pas une incartade est un grave écart de conduite. Mais pour avoir une vraie exclusion, il faut donner le générique. Un écart de conduite qui n'est pas une incartade est grave.
Pour la clarté, il faut souvent reformuler, mais c'est là que réside le principal intérêt des ces interventions, trop évidentes autrement. Par exemple l'obversion se reformule par une exclusion.
Si tout ce qui n'est pas une incartade est un écart grave, l'incartade n'est qu'un léger écart et rien d'autre. On n'est pas si loin de la converse : un léger écart n'est qu'une incartade, une simple incartade... On voit que la valeur de vérité n'est conservée que si l'exclusion est nette. Il faut donc que la proposition soit complète (omni, soli, semper). La preuve en est dans cette définition incomplète, comme on va le voir : Le rouleau à tarte est un ustensile de cuisine. Quand on fait l'inversion et la conversion, qu'obtient-on ?
Réaction 82


Ce qui n'est pas un rouleau à tarte n'est pas un ustensile de cuisine. Un ustensile de cuisine est un rouleau à tarte. Rien n'est plus faux, évidemment. Ce qui manque est exactement ce qu'il faudrait pour avoir une définition complète. Ajoutons "de forme cylindrique" et "pour aplatir la pâte" (les sèmes spécifiques de la définition) et les valeurs de vérité refont surface. (Un ustensile de cuisine qui n'est pas un rouleau à tarte n'est pas de forme cylindrique et destiné à aplatir la pâte. Un ustensile de cuisine de forme cylindrique pour aplatir la pâte est un rouleau à tarte.)

Les applications logiques demandent souvent un développement formel intermédiaire, qui aide à pénétrer les contenus propositionnels.
Soit deux propositions: Un grand éditeur ne peut publier qqch. de nul et La plupart y regardent à deux fois avant d'offrir un roman paraissant chez un éditeur à peine connu. Y a-t-il un rapport entre elles?
1 Non.
2 Elles reviennent au même (propositions symétriques).
3 Elles sont inverses.
4 Ce sont plutôt des converses (thème et prédicat permutés).
La bêtise n'est pas mon fort (Valéry). Il y a là une subtilité qui serait peut-être une obversion, mais de quelle phrase exactement?
1 J'ai un faible du côté de l'intelligence.
2 La bêtise est trop universelle pour m'intéresser.
3 Mon fort n'est pas la bêtise.
4 (Autre chose)
Réaction 83


Hyperlogicisme.

Le travail logique clarifie mais suffit-il à créer de la vérité? Citons R. Ducharme (l'Océantume, p145) : «Pourquoi ces reflets ne sont-ils pas sans lune? Là où il n'y a pas d'eau, il y a bien une lune sans reflets.» Logique : si l'un va sans l'autre, l'autre doit pouvoir aller sans l'un... Cela fait sourire dans le cas d'une relation de cause à effet, cependant, car la cause peut ne pas produire son effet mais l'effet peut plus difficilement aller sans cause. Ducharme joue-t-il le jeu des erreurs simulées? Dans son titre, l'océantume, il feint de pouvoir extraire la mer de l'amertume.

Le produit est parfois imbuvable, ou d'un humour grinçant. Le père d'Ubu roi, Alfred Jarry, s'en est fait une spécialité. Il écrivait dans le Canard Enchaîné, journal satirique. Voici un aperçu de sa prose. Il commente une réforme en cours, au Ministère de la Guerre. «Si le zèle du ministre des armées ne se ralentit pas, il est à craindre que, de suppression d'abus en suppression d'abus, il n'en reste plus du tout.» Hyperlogique, si les armées ne sont que des abus.
--- Pourquoi les jeunes retiennent-ils plus facilement les nouveautés tandis que les vieux se souviennent plus facilement de ce qu'ils ont connu étant jeunes? --- Parce que, quand ils étaient jeunes, c'était pour eux des nouveautés.
1 C'est logique.
2 Il y a cercle (vicieux).
3 C'est tautologique.
4 C'est un hyperlogicisme.
Réaction 84


Le sorite.

Avec un outil comme la logique symbolique de Lewis Carroll (Oeuvres, pléiade, p.1485-1629. Trad. J.Gattégno, publiée avec illustrations, Hermann, 1966), ou avec les patatoïdes ci-dessus, les avocats pourraient se faciliter la tâche, ramenant la diversité des arguments dans une cause à un ensemble de propositions cohérentes (quand la clarté les sert).

Mais la difficulté des causes (juridiques ou autres) est souvent dans le nombre excessif et la trop grande diversité des propositions simples. Un syllogisme, qui les multipliera puisque chacune de ses propositions ne contient qu'une substance et une qualité (un thème et un prédicat), risque alors d'alourdir. Plus souple serait la symbolisation de la logique formelle, mais en remplaçant les concepts par des lettres (x, y, m, n, o, p, etc.) on ouvre la porte aux erreurs de «calcul».

Ces obstacles peuvent valoir la peine d'être surmontés, cependant, si l'on considère les avantages du sorite. Celui-ci fait apparaître les lacunes possibles dans les chaînes de raisonnements. Un sorite est un empilement de syllogismes placés dans un ordre tel que si l'un d'eux, «entraîne une conclusion qui, jointe à une autre proposition, entraîne une autre conclusion, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'on ait considéré toutes les propositions, il est bien évident que si les propositions sont vraies, la conclusion finale sera également vraie.» (Ibid., p.1554.)
Ex. Tous les autobus sont bondés à midi. Or je suis monté dans l'S. J'ai donc été aplati. Or j'étais à côté d'un jeune muscadin. J'en ai donc profité pour lui écraser les pieds. Or il était vindicatif. J'ai donc essuyé des récriminations. Or une place s'est libérée. Il est donc allé s'asseoir. Or je rigolais de sa dégaine. J'ai donc passé le temps sans trop m'embêter. (Exemple tiré de la Clé des procédés (www.cafe.edu) et fabriqué comme variante aux Exercices de style de R.Queneau.)




Créer un sorite est relativement simple. Il faut fabriquer des majeures universelles qui viendront éclairer les cas particuliers, lesquels seront alors rangés dans un ordre progressif. En guise d'exemple, voici maintenant, transformée en suite logique, une mésaventure.
Majeure. Les feux rouges ne sont pas faits pour les chiens.
mineure. Or je ne suis pas un chien.
Conclusion. Donc je dois respecter les feux rouges.
M. Quand un feu change de couleur dans un sens, il ne change pas toujours en même temps dans l'autre sens.
m. Or je viens de voir le feu vert de la voie transversale passer au rouge.
C. Donc je dois vérifier si le feu rouge auquel je suis arrêté est lui aussi passé au vert.
M. S'avancer de quelques mètres, c'est déjà brûler un feu rouge.
m. Or j'ai avancé avant de vérifier si le feu avait bien changé aussi dans ma voie.
C. Donc même si je n'ai pas risqué de provoquer d'accident je puis être considéré comme ayant brûlé le feu.
M. Quand on se sent suivi par une voiture de police, mieux vaut ne pas avoir l'air d'accélérer.
m. Or je suis suivi par une voiture de police.
C. Donc je ralentis et reste dans ma file (celle de gauche).
M. Quand il gèle à moins quinze, les gens n'ont pas envie de sortir de leur voiture.
m. Or les policiers sont des gens.
C. Donc ils n'ont pas envie de donner de contravention pour pas grand-chose.
M. Quand une voiture de police est gênée dans sa progression, elle pense à allumer son girophare.
m. Or en ralentissant et en restant dans ma file, je gêne la progression d'une voiture de police.
C. Donc elle allume son girophare.
M. Quand on voit un girophare s'allumer derrière soi, il faut s'arrêter.
m. Or je vois un girophare s'allumer derrière moi.
C. Je me suis donc arrêté.
M. Brûler un feu rouge, c'est 138$ et trois points de démérite.
m. Or la voiture de police que j'ai immobilisée m'a vu brûler un feu rouge.
C. J'ai donc reçu une contravention.


Il y a quelques "trous" dans la séquence logique mais on pourrait s'amuser à compléter.

Quel degré de vérité peut-on attendre de la conclusion d'un sorite?
Vous avez un aquarium. Donc vous aimez les poissons. On peut penser dès lors que vous aimez aussi la mer. Donc vous aimez les plages. Alors, vous aimez contempler les baigneuses. Donc vous êtes hétérosexuel. De ce sorite (raisonnement en chaîne), peut-on tirer la réciproque abrégée: «Vous n'avez pas d'aquarium, donc vous êtes sans doute homosexuel»?
1 Sans doute, puisque chaque étape est cohérente.
2 On peut aimer la mer sans aimer les plages.
3 Tous ceux qui ont un aquarium aiment les poissons. La première majeure a donc une certaine universalité. Mais les autres...
4 Il faudrait une majeure exclusive (ceux qui ont un aquarium et rien qu'eux) pour obtenir la conclusion inverse.
Réaction 85


Il ne manque pas d'intérêt, pour le développement d'une idée, d'acquérir la capacité de composer les différentes formes de raisonnement. On a l'épichérème (proposition doublée de sa preuve), et le sorite (syllogisme en escalier, puisque la conclusion est aussi la majeure du suivant).
«Pour aimer cet être changeant, beau et laid tout ensemble, il fallait être un poète ou un homme corrompu. Le vieux vicomte n'avait pas en lui un grain de poésie. [...] Mais, comme il était corrompu, blasé et vieux de civilisation et de sens, il s'expliquait très bien qu'on pût s'arranger de toute cette laideur.» Barbey d'Aurevilly, Une vieille maîtresse.
1 Enthymème. Le syllogisme est incomplet, l'une des propositions est implicite.
2 Sorite. On enchaîne à une conclusion partielle une nouvelle prémisse, plusieurs fois, jusqu'à la conclusion.
3 Syllogisme. Toutes les étapes du raisonnement sont développées.
4 Poly-épichérème. Les arguments sont accompagnés chacun de leur preuve.
Réaction 86


De même que le poly-épichérème multiplie les épichérèmes indépendant, il y a des polysyllogismes, qui ont tous la même conclusion, laquelle s'en trouve sans doute renforcée, mais pas de façon suffisante. Si le polysyllogisme est elliptique, on parlera plutôt de poly-enthymème.
«Un homme n'est pas de bois, on est logé étroit, et les voilà grandettes» déclare sans vergogne un père abusif dans la Décharge de Béatrice Beck (p.137).
1 Enthymèmes.
2 Polysyllogisme.
3 (N'importe)
4 (Autre chose)
Réaction 87


Dans la pratique, le syllogisme prend sans doute un visage plus habituel.

Y aurait-il quelque lien entre les types de propositions syllogistiques, un peu vétustes quand même, et les types argumentatifs de la moderne pragmatique (qui seront développés dans les chapitres suivants, mais qu'on connaît déjà bien puisqu'ils s'appellent visée (thèse), argument et preuve?
Les enthymèmes sont donc ou des majeures (M), ou des mineures (m), ou des conclusions (C). Or on rencontre souvent des arguments (A), des thèses (T) ou des preuves (P). Ces trois formes ont-elles quelque parenté avec les formes canoniques? Peut-on esquisser certains rapprochements?
1 MA, mT, CP.
2 CA, MT, mP.
3 mA, CT, MP.
4 MA, mP, CT
Réaction 88


Logique et communication.

On peut conclure ce chapitre sur la logique sans insister davantage car on constate que le rêve rationaliste d'une logique qui règle d'avance la façon d'aborder clairement tous les problèmes possibles est un leurre. Les idées naissent dans la communication. Si elles se renouvellent sans cesse, pourquoi leur prêtons-nous si facilement une essence stable et durable? De par leur universalité?
Réaction 89


On alléguera la tradition, sans doute, à la suite des Grecs (et l'invention de la géométrie y est pour beaucoup car elle est le modèle de toute connaissance abstraite universelle), tradition approfondie par les philosophes arabes, par la scolastique médiévale, renouvelée par le cartésianisme, battue en brèche par la psychanalyse, Hegel, la sémiotique et le structuralisme... Pourquoi ne pas voir dans ce besoin de stabilité abstraite un réflexe collectif et institutionnel de la part des intellectuels, qui cherchent à assurer les bases de leur discours en tout domaine? Il importe d'être constant (comme dit un ironiste, G.B. Shaw) mais il y a risque à systématiser. La cohérence se réalise aisément dans les symboles, mais surtout s'ils se détachent de la réalité. Inutile d'invoquer l'hypothèse d'un «malin génie» venu brouiller nos esprits, comme celui de Descartes. La nature des idées pourrait bien nous échapper du fait de certains préjugés philosophiques. Et la difficulté pourrait bien venir du fait que nous négligeons de tenir compte de la dimension subjective et immédiate de nos perceptions. Ou bien serait-ce plus simplement les aléas de la communication? Ou bien autre chose encore?
Réaction 90


Ce que chacun comprend et ce que cela signifie pour lui est sans doute vérifiable (entre partenaires sincères et confiants) mais cette vérification elle-même reste sous le signe du malentendu, toujours possible, toujours invérifiable, et qui constitue (selon Baudelaire) la trame des échanges intersubjectifs. C'est ainsi pour les intentions que l'on prête à ses interlocuteurs (dimension perlocutoire) mais même pour le sens à donner aux mots (les dictionnaires ne donnent que ce qu'il y a de plus général dans le passé). A fortiori pour l'élaboration des raisonnements et la conviction souhaitée des conclusions... Les tribunaux n'auraient pas autant de retard dans leurs travaux si tout n'était pas toujours à reprendre.

La pratique, dans l'instant présent, est la seule issue. Les points forts de la logique, ici réunis, répondent à un besoin, postérieur à la pragmatique, antérieur à l'argumentation. Les parcourir, se poser ces questions en relation avec un domaine de recherche, ne peut qu'améliorer notre relation avec les idées et notre habileté dans leur maniement. Votre capacité de développer personnellement les définitions d'un domaine de recherche est à ce prix. Si forgées qu'elles soient, et pour pouvoir être forgées, nos idées sont des actes personnels qu'il dépend de chacun de conduire, dans cet instant présent qui s'offre à lui, présent seul actuel et agissant, acte libre de penser, en engageant sa subjectivité et sa liberté dans leurs limites propres, seule échappatoire aux violences de toutes sortes qui menacent l'individu. Et là, dans ce vide appréhendé du discours attendu que la logique structure en pointillé, vous allez pouvoir développer une pensée dont l'opération est reçue, rendue possible par votre choix, sans autre effort ni soumission à quelque méthode, avec des contenus d'origine diverse et invérifiables. Et c'est en ce sens aussi, et pas seulement au sens de Leibniz, qu'on peut parler d'idées innées, et d'innéité.

APPLICATION 1.

Chercher des inclusions, des exclusions, des identités, des intersections et des incompatibilités dans ses fiches doc. En faire une fiche synthèse intitulée : opérations logiques.

APPLICATION 2.

Sur le modèle du carré logique, tirer d'une proposition de ses fiches doc les trois autres (subalterne, contraire, contradictoire).

APPLICATION 3.

Chercher des enthymèmes dans ses fiches doc. Les développer en syllogisme.

Exemple 1 : «Pour appliquer une réforme totale de l'enseignement, nous devrons faire un effort considérable pour le recyclage des enseignants.»
Réaction 91


Corrigé : Raisonnement presque complet, avec ses deux pour... La principale, «effort à faire», peut servir de conclusion à un syllogisme. Comme moyen terme, on peut placer «réforme totale». La volonté de réformer l'enseignement étant particulière, elle peut servir de mineure. La majeure serait alors qu'une réforme porte avant tout sur le recyclage. On obtient ainsi le syllogisme suivant. Majeure : Réformer l'enseignement ne demande pas qu'une refonte des programmes. Autre majeure possible : La compétence des enseignants est primordiale. Mineure : Or nous voulons une réforme en profondeur. Conclusion : Donc, les efforts doivent se concentrer sur le recyclage.

Exemple 2 : «Où Locke et Rousseau ont-ils trouvé (lit-on dans un guide politique de la jeunesse, sous la Restauration) ces prétendus droits de l'homme à la liberté et à l'égalité?»
Réaction 92


Corrigé : Il s'agit d'une question oratoire... qui conteste ces droits, élémentaires aujourd'hui mais encore suspects, pour certains, entre 1814 et 1830. La conclusion (implicite mais espérée) est donc : La liberté et l'égalité sont injustifiables. Pour remonter au syllogisme complet, il faut trouver un moyen terme qui fasse le lien entre, d'une part, la liberté et l'égalité, d'autre part la justification. On pense à une opposition entre le droit humain (apparu au siècle des lumières) et un droit prétendument divin qui sert de fondement à l'autorité monarchique sous l'ancien régime. La monarchie est dans la Bible, soutient notamment Bossuet, parce qu'elle a été instituée par Dieu (théorie de la monarchie de droit divin). Comme la liberté et l'égalité entre les hommes ne sont pas explicitement contenues dans les livres saints, Locke et Rousseau... Bref. Reformulons en majeure, mineure, conclusion, avec répétition de trois termes. On obtient: Tout ce qui est juste et vrai est contenu dans les livres saints. Or la liberté et l'égalité ne sont pas contenues dans les livres saints. Donc la liberté et l'égalité ne sont ni justes ni vraies. C'est ce que devait penser et vouloir dire le manuel qui s'en prend aux deux philosophes. On voit que la mise en forme des raisonnements en syllogisme aide à tirer au clair tout ce qu'on doit comprendre...

APPLICATION 4. Établir des relations entre ses fiches doc.

Prendre les fiches doc qui ont reçu des vedettes génériques et spécifiques et les disposer selon leur proximité apparente. En choisir de très proches. Faire une fiche synthèse qui les réunit en montrant que leurs vedettes sont en inclusion, en exclusion ou en intersection.

Exemple. Deux fiches doc sur le tiers monde ont la vedette générique : Occident.

1. Contre le tiers monde, depuis un demi-millénaire, tout a été mis en oeuvre, depuis le pillage de leurs richesses et la destruction de leurs structures sociales, jusqu'à la négation de leur culture, pour arrêter leur développement. (Vedette spécifique : développement arrêté)

2. Mitterand semble avoir choisi de plaider pour ce que j'appellerai un «tiers-mondisme atlantiste», c'est-à-dire un moyen d'organiser autour de l'Occident le développement du tiers monde. (Vedette spécifique : développement décentré)
Réaction 93


Corrigé. (fiche synthèse). Titre : Développement du monde non occidental. Ou : Relation Occident-tiers monde. Les fiches sont compatibles car la première décrit cinq siècles d'histoire et la seconde une politique française récente. Il y a inclusion dans la mesure où un développement décentré n'a pas redémarré. Il y aurait au contraire exclusion si on considérait la politique mitterandienne comme positive, favorable au développement. On argumentera en parlant de «trop peu trop tard» si l'on considère qu'il y a intersection.

Autre application utile : reprendre sa contraction de textes et en tirer un sorite.

APPLICATION 5. Rapport. Recommandations.

Le rapport administratif.


Page de titre et introduction. Nom de l'organisation d'où provient le rapport (en-tête imprimé). Titre (Rapport...). Lieu et date.

Circonstances (A la demande de..., Pour faire suite à la recommandation de...). Destinataire (A l'intention de...). Rapporteurs (Rédigé par..., avec la collaboration de...) nom, titre et fonction.

Mandat (fait, causes, conséquences, importance, but).

Démarche suivie (Ce rapport se fonde sur une enquête, un sondage, un échantillonnage...).

Portée (Ce rapport touchera... et entraînera..., mais aura comme limites...).

Sommaire (Les grandes lignes du rapport sont...).

Développement.

Premier point. 1. Faits observés, quantification, vérification, témoignage, citation, sources.

2. Explication, analyse, interprétation (de quoi les faits sont des indices), argumentation (de quoi ils sont des preuves), alternatives qui s'offrent, avantages et inconvénients, objections possibles, réfutation des objections.

3. Solutions possibles concrètement.

Deuxième point (idem). Troisième...

Page de conclusions.

Jugement d'ensemble (points forts et points faibles: résumer).

Recommandations (description d'actions précises).

Réf. Audry M. et J. Roumagnac, Précis de rédaction de rapports, comptes-rendus, procès verbaux, notes et instructions, Paris, Foucher, 1969, 167p.
Laquelle des phrases suivantes convient le mieux, au terme du rapport d'un comité à mandat?
1 Nous recommandons que la Ville de Montréal accorde à Miro inc. le contrat de déneigement municipal no 336726.
2 Nous souhaitons que la Ville etc.
3 Compte tenu du rapport 824 du Service de la Voirie, nous croyons que la Ville de Montréal devrait accorder à Miro inc. etc.
4 Nous recommandons que le contrat de déneigement municipal no 336726 soit signé dans les plus brefs délais.
Réaction 94


Exercice sur la rédaction de recommandations.


Les recommandations ne doivent contenir ni voeux, ni appréciations (1); ni proposition ne venant pas du développement, ni renvoi au développement (2); ni imprécisions, ni affirmation personnelle (3); ni phraséologie oratoire, ni rien de superflu (4).

Remanier les recommandations suivantes:

1. Nous souhaitons que l'Honorable Georges Bouey considère nos récentes propositions avec bienveillance, et que dorénavant il laisse le dollar canadien flotter et qu'il n'intervienne que s'il touche le plancher des 65 cents.
Réaction 95


Corrigé. Nous recommandons que l'Honorable Georges Bouey laisse le dollar canadien flotter et qu'il n'intervienne que s'il touche le plancher des 65 cents.

2. Nous recommandons que le groupe Québecor achète «la Presse» aux conditions précédemment discutées; et qu'en contradiction avec les conclusions de ce rapport, mais en accord avec la politique générale de M. Péladeau, M. Landry demeure à son poste.
Réaction 96


Corrigé. Nous recommandons que le groupe Québecor achète «la Presse» aux conditions suivantes (préciser) et que M. Landry demeure à son poste.

3. Tout bien considéré, même si ce cours de premier cycle n'a pas le nombre d'étudiants requis pour être ouvert, nous considérons qu'il devra être dispensé en septembre prochain.
Réaction 97


Corrigé. Nous recommandons que ce cours soit dispensé en septembre prochain.

4. Nous recommandons, Monsieur le Maire, que soit retiré le règlement 6513 qui, d'après nous, empêche le développement du quartier chinois à l'est du boul. Saint-Laurent, et porte ainsi gravement atteinte au développement économique d'une communauté dynamique et chère au coeur de tous les Montréalais.

Réaction 98


Corrigé. Nous recommandons que soit retiré le règlement 6513 qui empêche le développement du quartier chinois à l'est du boul. Saint-Laurent.

Fin du module sur la logique. C'est bientôt la problématique qui va retenir notre attention.

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