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DISCOURS ORATOIRE

Informations.
  1. Temps et lieux.
  2. Auteurs et oeuvres.
  3. Définition et fonction dans la société.
  4. Origines et postérité.
  5. Bibliographie.
Extraits. Discours du 6 juin 1944.
Discours du 27 janvier 1978.
Discours du 3 octobre 1991.
Procédés typiques. Ingrédients.

1. Temps et lieux.

Début et fin. De la chute de Trasibul (-465) à nos jours.
Lieux. Antiquité : Sicile, Grèce, Asie Mineure, Sparte, Rome. Époque moderne : Occident. (Beaucoup de civilisations ont développé des arts de bien dire à fonction persuasive mais cela ne veut pas dire que les techniques rhétoriques classiques sont universelles.)

2. Auteurs et oeuvres.

Grèce.
Antiphon (480-411).
Lysias (440-360), Contre Eratosthène (-403).
Isocrate (436-338), Panégyrique d'Athènes (-380).
Isée (420-343).
Lycurgue (390-324), Contre Léocrate.
Hypéride (390-322), Oraison funèbre (-325).
Eschine (390-315), Contre Timarque (346), Sur l'ambassade infidèle (343), Contre Ctésiphon (330).
Démosthène (384-322), Contre Androtion (355), Contre Leptine (355), Contre Timocrate (352), Pour les Mégalopolitains (353), Pour la liberté des Rhodiens (352), les Philippiques (351-341), les Olynthiennes (349), De la fausse ambassade (343) et Sur la couronne (330).

Italie romaine.
Caton (234-149), discours (194-149).
Cicéron (106-43), les Verrines (-70), les Catilinaires (- 63), les plaidoiries (Pour P. Quinctius, -81; Pour S. Roscius d'Amérie, -80; Pour Q. Roscius, le comédien, -67), les Philippiques (44-43); Sénèque (58-41 env.), Déclamations, Controverses; Pline (61-114), Panégyrique de Trajan.

Les Pères de l'Eglise.
Les prédications de saint Ambroise (340-397), de saint Augustin (354-430), de saint Basile de Césarée (329-379), de saint Grégoire de Nazianze (330-390) et de saint Jean Chrysostome (334-407).

La prédication au Moyen Âge.
Les prédications de saint Thomas d'Aquin (1225-1274).
Savonarole (1452-1498), Sermons (1483-1498).
Gerson (1363-1429), Sermons (1389-1414).

La réforme et la Renaissance.
Les prédications d'Eckart (1260-1327), de Tauler (1297-1361) : Sermons (1300-1361), de Luther (1483-1546), de Coëffeteau (1574-1623), de saint François de Sales (1567-1622), de Pasquier (1529- 1615) : Exhortation aux princes et seigneurs (1561) et d'Arnauld (1612- 1694).

La prédication au siècle classique.
Les prédications de Bossuet (1627-1704), Panégyrique de saint Paul (1657), Panégyrique de saint François d'Assise (1652), Panégyrique de saint Bernard (1653), de Fléchier (1632-1710) et de Massillon (1663-1742).

L'éloquence politique au XVIIIe siècle.
- En Angleterre: Bolingbroke, Chatam, Pitt.
- En France: L'abbé Maury
Danton (1759-1794), discours (1790-1794).
Robespierre (1758-1794), Discours sur la liberté de la presse (1789), Discours sur la peine de mort (1791), Discours sur l'Etre suprême (1794).
Mirabeau (1749-1791), discours (1791).
Napoléon, proclamations (à partir de 1796).
Constant (1767-1830) Lamartine (1790-1869).

Orateurs religieux et universitaires du XIXe siècle.
Frayssinous, conférences (à partir de 1803).
Lacordaire (1802-1861), Conférences de Notre-Dame de Paris (1835).
Villemain.
Cousin (1792-1867).
Quinet (1803-1875).

L'éloquence politique à l'époque moderne.
Les discours de J. Simon, de J. Favre, de Gambetta, d'A. de Mun, de Clémenceau, de Jaurès, de Mussolini, de Hitler, de Goebbels, de de Gaulle, etc.

3. Définition et fonction dans la société.

Texte écrit suivant des lois et des techniques de composition précises (établies et étudiées par la rhétorique) et destiné à être prononcé devant de nombreux auditeurs qu'il vise à persuader de quelque chose.

La persuasion (vs la démonstration) n'appartient pas au seul logos. Elle requiert le double accord de celui-ci, d'une part avec l'autorité morale de l'auteur et de sa cause (ethos), d'autre part avec les sentiments qu'il éveille chez ceux qui l'écoutent (pathos). L'orateur emploie donc plus volontiers l'enthymème allusif que le syllogisme et la métaphore que l'analogie.

La règle suprême est celle qui exige que le discours soit adapté à ses fins et à son auditoire. Chacune des composantes du discours doit concourir à sa fonction persuasive.

Les anciens distinguaient trois genres de discours oratoires en fonction de la situation d'énonciation et de la visée. Le premier critère est la fonction de l'auditoire : il est juge d'événements ou d'actes passés dans le genre judiciaire; il est appelé à prendre une décision (politique ou autre) concernant l'avenir dans le genre délibératif; dans le genre épidictique (ou démonstratif), il est sollicité pour évaluer en bien ou en mal tel comportement présent.

Dans tous les cas, le discours oratoire est requis par les affaires publiques. Il vise la production d'un effet social.

4. Origines et postérité.

Origines.
Sicile (alors colonie grecque). La chute des tyrans, tout particulièrement celle de Trasibul (roi de Sicile) en -465, entraîna la revendication (sous forme de procès) des propriétés privées dont s'étaient emparés les anciens chefs des villes siciliennes. Les causes étaient plaidées par les intéressés eux-mêmes devant des jurys populaires. A cette occasion, certains plaideurs surent recourir à des procédés qui leur assura la victoire. Les premiers, Corax et son disciple Tisias eurent l'idée de les noter, de les systématiser et de les enseigner. Ils rédigèrent des formulaires-guides à l'usage des parties en litige. Vers -460, Corax écrivit un manuel : Technè rhétorikè, qui constituait un ensemble de préceptes pratiques éclairés par des exemples. Selon un témoignage d'Aristote repris par Cicéron, les discours oratoires auraient existé avant eux, mais non pas sous la forme de discours soumis à des règles de production précises.

La rhétorique judiciaire passa en Grèce continentale où les disputes politiques engendrées par l'abolition des régimes aristocratiques lui donnèrent son développement. Son plus grand représentant fut Antiphon.

En -427, le rhéteur Gorgias vint de Sicile à Athènes et prononça devant l'assemblée un discours. Il se signala par deux créations : le discours épidictique et la prose artistique (la prose gorgianique : symétries, parallélismes, assonances, allitérations, périphrases, métaphores, etc.).

Postérité.
- A partir d'Aristote (384-322), la rhétorique comme méthode de composition des discours se trouve fixée. Cicéron (106-43) et Quintilien (30-100) enrichissent le système sans le modifier. Ce système survit jusqu'au XIXe siècle. Au fil des siècles, la rhétorique transmet à l'Occident les normes de la parole publique. Les normes élaborées par Aristote pour la démocratie athénienne et par Cicéron pour la république romaine sont adaptées par Quintilien au projet "civilisateur" de l'Empire romain puis par saint Augustin et les Pères de l'Eglise à l'univers des communautés chrétiennes (le discours prend la forme du prêche, du prône, de l'homélie, du sermon, de la prédication). Le modèle de l'orateur est diffusé à la Renaissance dans l'Europe entière et dans ses extensions outre-mer.
- Déclin de la rhétorique. C'est au XIXe siècle que la rhétorique connaît son déclin. Les discours du barreau, de la chaire et de la tribune restent fidèles à la tradition. Mais on commence à apprécier la simplicité, la concision, le naturel. Détracteurs de la rhétorique : les romantiques. En 1885, elle disparaît des programmes de l'enseignement secondaire français.
- Actualité de la rhétorique. Le genre judiciaire et le genre délibératif survivent, sous la forme de la déclaration, du plaidoyer, de l'apologie, du réquisitoire, de l'avis, de la déclaration politique, de la harangue, de la parénèse, de l'admonestation, de l'objurgation, de la conférence, de l'exposé. Le genre épidictique sous la forme de l'allocution, du laïus, du speech, de l'éloge, du compliment, du panégyrique, de l'oraison funèbre.

Mais le discours oratoire ne peut se manifester de nos jours que dans un style simple. En France, par exemple, avec la IIIe République, l'éloquence politique tend à devenir plus simple, plus populaire et plus pratique. On préfère désormais un discours qui donne l'apparence de l'improvisation. Au Parlement et au barreau, le débat peut prendre une tournure imprévue. L'improvisation nécessite d'autres techniques, qui s'écartent de celles de l'ancienne rhétorique. On met l'accent sur l'action oratoire et sur l'acquisition d'automatismes.
- De nos jours : dissolution de l'univers du discours sur lequel s'étaient formés les concepts centraux de la rhétorique. Apparition de situations inédites. Dissolution de la notion d'auteur (la plupart des messages de la communication sociale n'ont pas d'auteur déterminé. Ex. : les informations données à la radio ou à la télévision).
- Apparition de discours persuasifs nouveaux, dont la rhétorique peut rendre compte. Ex. : la publicité. Elle applique les procédés de la rhétorique. Il y a des lieux communs, un plan, une élocution, des figures, une action. L'apostrophe de la rhétorique classique correspond à la personnalisation de la publicité. Aux Etats- Unis, de nombreuses universités possèdent des départements de rhétorique où les textes publicitaires et les discours politiques font l'objet d'études pour les futurs enseignants aussi bien que les futurs orateurs. Le système de l'Antiquité, pour s'être sans cesse adapté à de nouvelles circonstances, entre désormais dans les parages plus larges et plus clairs de la pragmatique du discours. Il est appelé à se développer plus que jamais, de façon de moins en moins convenue et de plus en plus sincère.

5. Bibliographie.

ARISTOTE, Rhétorique, Les Belles Lettres, 1967, 2 vol.
DECLERCQ, Gilles, l'Art d'argumenter. Structures rhétoriques et littéraires, Éditions universitaires, 1993.
FLORESCU, Vasile, la Rhétorique et la néorhétorique. Genèse, évolution, perspectives, les Belles Lettres, 1982.
KERBRAT-ORECCHIONI, Catherine, Déambulation en territoire aléthique, in Stratégies discursives, Presses universitaires de Lyon, 1978, p. 53-102;
PERELMAN, Chaïm et Lucie Olbrechts-Tyteca, Traité de l'argumentation. La nouvelle rhétorique, Éditions de l'université de Bruxelles, 1988;
REBOUL, Olivier, la Rhétorique, PUF, Que sais-je?, 1984.

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